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Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


dimanche 22 avril 2018

Actuel 126 Syrie avril 18

                        Repère : Le mari de Mrs. Theresa May, première ministre britannique, s'appelle Mr. Philip May. Il est gérant d'une firme d'investissements, actionnaire de la plus grosse entreprise US d'armements — Lockheed Martin —. Les frappes contre la Syrie lui ont valu une double fortune : par montée en flèche immédiate de l'action Lockheed, et par assurance de nouveaux contrats, notamment pour remplacer les dizaines de missiles tirés (en gros un million de dollars chacun).

                        1. Principaux acteurs directs (gouvernements)
            – Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Arabie Saoudite, Israël, face à
            – Russie et Iran. 
            La Turquie, empêtrée pour le moment, oscille.

                        2. Essentiel historique
            Il faut, pour comprendre l'agression contre la Syrie, remonter bien plus loin dans l'histoire que Sykes-Picot et voir comment les coloniaux les plus barbares de l'histoire, en violence et en durée, se posent aujourd'hui en tenants de la morale : largement dans le cadre de leur héritage religieux. On doit donc au moins mentionner les guerres mondiales (ainsi l'Allemagne, vaincue de ces guerres mais de même référence religieuse, figure parmi les soutiens des frappes anti-syriennes), et rappeler les innombrables coups d'Etat et génocides dus à CIA, MI6 et services de Françafrique (Iran, Guatemala, Chili de Pinochet pour ceux qui semblent les moins effacés de la mémoire collective ; mais bien plus largement les sauvageries coloniales notamment en Asie, Afrique et Amérique Latine).
            Il est plus juste encore de restituer précisément le rôle de l'Eglise. Car ce rôle
            – commence à son héritage romain (cf. Edward Gibbon) et continue par ses faveurs aux criminels esclavagistes (servage européen, génocide des Amériques et de l'Afrique distribué par les papes après les barbaries européennes de l'Inquisition)
            – se prolonge par les haines contre les mouvements sociaux — d'abord contre la grande Révolution française, puis contre les révolutions européennes
            – et se perpétue par soutien indéfectible, depuis l'hitlérisme, à ses semblables et à ses héritiers.
            La profonde disjonction, schizophrénique, issue de l'enseignement biblique
            – actes de barbarie insurpassable // référence aux valeurs de fraternité
            – systématisation d'esclavage avec torture // affirmation de religion d'amour
a certes été portée à son comble dans l'hypocrisie des dirigeants anglo-saxons et de leurs intégrismes évangélistes : mais elle est inscrite dans toute l'histoire de la chrétienté et ses catéchisations de mensonges (le monde fait en six jours...).

                        3. Données stratégiques d'ensemble (géopolitique)
            Dans cette ligne, le cas de la Syrie correspond au stade actuel de la "stratégie du fou" dont on parlait déjà du temps de Richard Nixon : pour parvenir à la domination mondialeconvaincre l'adversaire qu'on est prêt à risquer n'importe quoi, guerre d'anéantissement comprise. Cette conviction exige une préparation psychologique où la propagande (procédé nommé et catégorisé, de propaganda fide, par l'Eglise romaine) retrouve le rôle qu'on associe aujourd'hui volontiers (non sans quelque raison) à Goebbels, mais dont de nombreux exemples remontent plus loin et plus juste : Goebbels, lui, se référait volontiers à la brutalité au lieu de la tartuferie.
            Pour les Etats-Unis, après la guerre contre le Mexique, il y eut par exemple l'attentat qui permit la guerre contre l'Espagne (provocation sous fausse bannière détruisant le Maine en rade de la Havane) ; puis la Creel Commission et les procédés de Propaganda (Bernaÿs), le laisser-venir de Pearl Harbor, les déchaînements de Dresde, Hiroshima et Nagasaki pour faire entendre à l'URSS ce dont les Anglo-Saxons étaient capables contre elle, l'hystérie McCarthyste contre "le communisme athée" (déjà Nixon, avant la dictature des frères Dulles), la course aux armements accompagnée des innombrables subversions d'Etats (l'Iran et toute l'Amérique latine, mais aussi le génocide indonésien contemporain de la guerre du Viet-nam), puis le remplacement partiel de l'anticommunisme par l'anti-islamisme dès les années 1975 (Team B de Bush 41, avec l'Afghanistan et Oussama ben Laden, aussi mené par la BCCI et le même William Casey, patron catholique de la CIA, qui s'était déjà distingué en Indonésie en compagnie d'Allen Dulles) et jusqu'aux montages du 11 septembre 2001 et à la guerre "contre le terrorisme" qui a soutenu jusqu'à présent les pires terroristes (Al Qaida), en particulier contre le régime syrien.

                        4. Données tactiques
            4. 1. Gaz
            Une première provocation a eu lieu, à une échelle microscopique : les laboratoires britanniques de Porton Down ont fait un raid, à la ville voisine de Salisbury, contre un agent double. Si victimes il y a, elles sont deux, et l'une au moins se porte comme un charme (la fille, interdite de communication par les flics anglais). Mais le fait divers a été porté en renouveau hystérique par la presse Murdoch (parfaitement dans la ligne, pour cette affaire Skripal, de ce que Hearst et ses journaux avaient accompli à partir du dynamitage du Maine, cf. ci-dessus). A partir de là, les faits n'importent plus : on parle de gaz-Russiegaz-Russie, gaz-Russie, indéfiniment. Comme avec Goebbels, le mensonge répété mais renforcé de tartuferie et systématisé à échelle mondiale devient plus fort pour la manipulation des foules que la référence à la réalité, la vérité même assez apparente (c'est ce qu'on a conceptualisé aujourd'hui en "ère de la post-vérité").
            Ainsi les matraqués sont rabaissés à l'animalité (on parle de "peur" : c'est éthologiquement incorrect — il y a en effet "peur de sortir du troupeau", mais plus fortement et précisément : primo instinct grégaire, secundo offre de décharge agressive, haine, typique de la "religion d'amour"). Ainsi toute affirmation de gazage syro-russe est d'office (post-)"vraie" et les trois Etats, criminels de guerre de longue date, sont eux les tenants de la (post-)morale internationale...
            C'est malgré tout bien étrange. Car par exemple, les frappes (rappel : au bénéfice de Lockheed Martin etc.) sont intervenues pile alors qu'une mission internationale un peu trop indépendante venait vérifier la destruction de l'arsenal chimique syrien — mission de l'Organisation Internationale contre les Armes Chimiques (OIAC, en sigle anglais OPCW), qui n'aurait pu que démontrer la fausseté des allégations occidentales. A la suite des tirs de missiles, l'ancien président de cette organisation (José Bustani) a publiquement rappelé qu'il avait dû démissionner en 2002 dans une situation analogue (remise d'un rapport défavorable à la propagande de guerre) devant les menaces de mort proférées contre ses enfants par John Bolton— le même qui vient d'être nommé conseiller à la sécurité nationale des USA par D. Trump —. On peut étendre indéfiniment ce rappel des procédés mafieux CIA-MI6 etc., mais on ne soulignera jamais assez à quel point cette fausseté est une mentalité admise et systématique ("l'air qu'ils respirent", a dit Chomsky des fondements des actes et rapports des Kennan, Nitze, Casey, Cheney, Rumsfeld — ces deux derniers pour le PNAC, Project for a New American Century, dont nous vivons les conséquences depuis 2001) qu'on ne peut séparer de ses racines chrétiennes.
            Il y a "mieux".
            Les Occidentaux n'ont pas levé le petit doigt (sauf pour lui manifester de l'amitié — par Rumsfeld) lorsque Saddam Hussein gazait (entre autres) les Kurdes par milliers — les plus sévères évaluations de morts syriennes par attaques chimiques ne peuvent guère dépasser quelques centaines, et tout contredit qu'on les attribue au seul régime en place : l'armement des groupes "islamistes" par US-UK, aussi subit que considérable, a de notoriété publique inclus des armes chimiques notamment en faveur des fameux "Casques blancs", groupuscule terroriste déguisé en humanitaire par le MI6, cf. des dizaines d'articles accessibles même par Google—. Mais dans l'axe et l'élan de l'affaire Salisbury-Porton-Down-Skripal, les gentils chefs d'Etats d'Occident se disent tout à coup révulsés par les odeurs de gaz : de toute (post)-évidence russe...
            En tout, partout, pour la vérité ce ne sont pas les preuves ni les arguments qui manquent : mais comment réveiller les gens narcosés depuis quelque cinquante ans (ou deux mille) ? quel tri faire, pour entraîner l'écoute des citoyens eux-mêmes pressurés et opprimés ? comment agir contre la dictature et ses "press'titués" ?
            4. 2. Contexte international
            On connaît la maîtrise par les Occidentaux des organisations internationales [jusqu'ici l'OIAC-OPCW y a(vait ?) partiellement échappé] : on sait le rôle dictatorial du Conseil de "Sécurité" à l'ONU, la corruption des délégations d'Etats notamment parmi les plus pauvres, les crimes perpétués par astuces comptables (en monnaie, valeur économiquement antidémocratique et antiscientifique par excellence) par Banque Mondiale, FMI, BCE à la suite puis en compagnie de BRI-BIS, etc.
            Dans les énormités qui ne cessent ignoblement de prétendre à la morale et d'utiliser les conditionnements religieux, on doit remarquer le ferme soutien à la "coalition internationale" du wahhabbisme islamique... Il faut là-dessus consulter le remarquable calendrier établi par Craig Murray, ancien ambassadeur britannique
On y voit s'intriquer propagande préparatoire à de nouveaux drames de guerre et visites d'Etat à Londres, Washington et Paris de "MBS", Mohammed ben Salmane. Ce personnage, membre important de la dictature féodale sur la malheureuse Arabie, s'affiche en propriétaire privé du pétrole de son royaume (utilisé pour faire tourner des robots et automates et ainsi détruire le contre-pouvoir ouvrier jusque dans les pays riches). Etrange soutien aux "judéo-chrétiens" ! Mais il est vrai que ce dernier qualificatif (néologisme qui eût fait rire ou grincer des dents dans les années 1930 et 40) n'est qu'une autre preuve des niveaux atteints en stupidité imposée : si demain l'intérêt de tel ou tel groupe financier l'exige, il parlera aussi bien d'islamo-christianisme ou de toute autre combinaison de déismes et de "sagesses" orientales (on a vu déjà s'allier nazisme de Hitler et shintoïsme japonais)...
            De même, la mort de la diplomatie et du droit international dans le cirque onusien est bien présentée par l'ancien ambassadeur français Michel Raimbaud : 
il résume, à propos de la Syrie,un bilan de "400.000 morts, 13 ou 14 millions de réfugiés, exilés ou déplacés, un pays ravagé". Mais dans le racisme, terrible, répandu et inconscient, comment faire comprendre que ce ne serait ni plus ni moins révoltant si ce tableau était celui de la France — ce qu'il a été à peu près dans les années 1939-45 ?
            4. 3. Eléments de politiques intérieures
            On doit souligner que les trois chefs d'Etat les plus directement agressifs sont minés par des problèmes de politique intérieure, et que le dévoiement belliciste est un utile dérivatif contre les luttes sociales : Trump s'est isolé de pratiquement tous ses concitoyens, privilégiés ou non, et ne tient que par mise en scène et capitulations voilées devant l'establishment ; May ne peut surmonter les multiples oppositions à la catastrophe du Brexit ; enfin ici nos traîtres de pourris et journaleux s'efforcent de nier que Macron fait face non seulement aux colères à Air France, à la SNCF, dans les facs et chez les retraités, mais aux liens qui (trop lentement encore) commencent à se tisser entre ces révoltes.

                        5. Conclusions
            5. 1.On parle de mollesse russe, voire de coordination occidentalo-russe (en partie pour les spéculations, du genre rappelé ici en sous-titre : Repère). L'Actuel précédent (125) a dit les attaches très occidentales et monétaires des milliardaires russes et chinois : c'est aggravé chez les Russes par une tradition chrétienne — renouvelée depuis quelque vingt ans —, et par une coterie (aussi ancrée dans l'histoire) qui veut confondre l'Ouest et un paradis à portée de main. Il y a plus.
            Un navire (USS Donald Cook), qui pour des essais de guerre électronique s'était porté au moment ukrainien en Mer Noire puis dans la Baltique, a été expédié début avril en Méditerranée orientale pour coordonner les frappes. Or lors de son voyage nordique, il avait été déjà "agressé" par un avion russe pour brouillage hertzien. Etait-ce déjà entente ou démonstration de supériorité ou crainte, d'un côté ou de l'autre ? un piège des Etats-Unis ? Les Russes s'illusionnent-ils sur leurs armements, électroniques ou non ?
            Il faut simplement dire : le citoyen ordinaire étant plus mal informé encore que les stratèges, on doit surtout voir qu'on est en pleine folie. Dès lors, à la question : "les fous au pouvoir sont-ils capables d'aller plus loin encore ?", un tout petit peu d'histoire suffit pour ne pas hésiter à répondre : oui.
            Si le faire voir pouvait réveiller les gens, pour une fois, un peu à temps !
            5. 2.Les privilégiés sont certes les plus coupables, d'utiliser les réactions animales chez les humains. Mais jusqu'à quel point faut-il exonérer de responsabilité les gens qui acceptent si facilement de parader en supériorité, par exemple de "race" (inexistante) ou de religion (très existante), ou qui sous prétexte de quotidien trop encombré refusent de s'informer, surtout des malheurs des autres ?
            Il y a aussi, c'est vrai, les égareurs qui parlent de classes quand il faudrait parler de science du comportement et de manipulation des foules... Et ceux-là, faut-il aussi leur pardonner leurs postures de profonds savants, quand ils ne font que ressasser une religion qui ne s'avoue même pas pour telle ?
            5. 3.Désormais, la nécessité la plus absolue et urgente est la coordination des luttes contre les pouvoirs en place, à toutes les échelles : locales, nationales, mondiale. Or ce n'est possible, si l'on recherche quelque succès à terme, qu'à partir d'une vue commune, expérimentale et assez globale. Ce blog ne vise pas autre chose, et ne peut davantage que de tenter une présentation de cette vue
donc en insistant, à partir de la science du comportement,
sur le caractère de maladie historique et psychique
que représente la structuration animale actuelle des sociétés humaines
par le pouvoir au lieu du savoir, par la violence au lieu de la conscience.

samedi 14 avril 2018

Actuel 125 Contre les fous

                        Surtout aux moments où la révolte est juste et violente, garder la tête froide.
            Ces 13-14 avril 2018 les malades mentaux, qui disposent des plus terribles leviers de commande au monde, ont déclenché une attaque contre la Syrie
au moment où une mission internationale devait commencer son enquête sur place
et donc démontrer la vacuité des accusations qui prétendent justifier cette attaque.
           Hitler et Göbbels n'auraient pas procédé autrement.

                        Dès lors qu'une barbarie apporte ainsi la preuve de son mépris absolu pour les valeurs humaines et la raison, tout discours de légitimité et morale revient à entrer dans le jeu des propagandes et égarements de foule, où les dirigeants ont un professionnalisme inégalable. Il faut donc au contraire dénoncer d'abord la tactique de ces fauves.
            Ce n'est pas  la Syrie qui est visée, c'est la Russie et son alliance avec la Chine. Son succès relatif en Syrie n'est rien à côté de son retour en force sur la scène mondiale. C'est cette concurrence que ne peuvent supporter les gouvernants US et leurs associés — dont le président français, qu'on a vu tout récemment s'incliner jusqu'à l'obscénité devant un dictateur autrement terrible qu'Assad : le féodal chef d'Arabie Saoudite, en tournée de pré-guerre chez les trois pires coloniaux.
            Si la Russie se contente de passes d'armes au "machin" (l'ONU vue par de Gaulle), elle perdra son écho parmi les forces qui se tournent vers elle pour répondre au totalitarisme financier mondialisé US-UK-UE. Par contre si la Russie réagit au niveau qu'il faudrait, les fous se précipiteront sur ce nouveau prétexte pour l'accuser de bellicisme et frapper plus fort, tranquilles d'être bien accompagnés par les réflexes conditionnés dans leurs peuples depuis des décennies.
            C'est sur ce jeu infernal qu'il faut raisonner.

            Il faudrait savoir ce que sont les intérêts des milliardaires russes et chinois. Il faudrait connaître les tractations entre leurs courtiers, et ceux des banquiers installés de plus longue date à la BRI (Banque des Règlements Internationaux — où ont leurs entrées aussi bien la Fédération de Russie que la République "populaire" de Chine, en bonne compagnie des héritiers de Norman et Schacht, respectivement gouverneur de la Banque d'Angleterre et financier en chef d'Hitler, à qui nous sommes principalement redevables de la Seconde Guerre Mondiale).
            On commencera à avoir des éléments de réponse d'après la réaction russe dans les jours, plutôt que les heures, qui viennent.

jeudi 12 avril 2018

Actuel 124 Guerres

                        En juillet puis août 1914, les dirigeants d'Europe ont simplement vérifié que le réflexe grégaire national l'emporterait sur les efforts de l'Internationale socialiste : ils ont alors déclenché la guerre, dans la tranquille assurance que cela leur permettrait de prolonger leurs privilèges pour au moins une génération.
            En fait, leur conduite (ou leur inconduite) des hostilités a été si stupide que leurs espoirs ne se sont pas aussi simplement réalisés : les soldats russes, envoyés au front sans armement, ont réagi finalement assez fort pour créer un ennui que les aristos n'avaient pas prévu. Il faut éviter toutefois deux énormes fautes historiques :
            – l'une consiste à croire que la révolution russe de 1917 était issue du marxisme, alors que les marxistes n'ont fait que chevaucher (avec de graves erreurs) ce qui les a portés
            – l'autre consiste à oublier que la révolution allemande (1918-23) a bien failli éviter à l'Europe le drame du nazisme, mais que celui-ci a pu être forgé dans l'entente entre les dirigeants (anglo-saxons et allemands plus spécialement, bien que par exemple les pétainistes français s'y soient agrégés dès la fin des années 1920 — cf. Actuel 120, surtout paragraphes F. 1 et 2 en milieu d'article).
            Mais surtout, en résumé :
le sentiment animal, bien manipulé, d'appartenance au troupeau (en l'occurrence national) s'est avéré assez fort pour rendre efficace la propagande de guerre, alors que toutes les preuves historiques existaient, et depuis longtemps, pour démontrer qu'il n'y a jamais à "choisir son camp", et que dans une guerre (extérieure) tous les peuples sont perdants, ce qui jusqu'ici a rendu largement vaines les tentatives d'humanisation de la planète et de la vie.

                        Les malades obsédés de domination à n'importe quel prix ont, après 1914-18, accumulé les défis à toute raison politique et économique, notamment pendant les crises allemandes puis à l'occasion du crash de Wall Street en 1929. Malgré ces fautes parfois invraisemblables, le rattrapage par l'offre de décharge agressive et par appel à la violence débridée a ensuite de nouveau fonctionné — depuis les Freikorps ouvrant le chemin à Hitler et à ses sbires jusqu'aux Kollaborateurs du nazisme dans toute l'Europe —, permettant une destruction monstrueuse de la Russie et de la tentative (pourtant bien mal conduite) d'une société sans étalage d'inégalité de principe et à tous niveaux.
            De cette nouvelle horreur inhumaine (1939-45) est résulté un monde où les exploitations de travail et surtout de crédulité ont été assez renforcées pour aboutir à la défaite complète de la tentative soviétique. Cette défaite était inscrite dès 1945 dans les inégalités de puissance des nations, mais elle fut aussi poursuivie avec maestria par la surexploitation des colonisés et le pillage des colonies, surtout en Amérique latine et Afrique (nord et sud), mais aussi en Asie, accompagnés par la course aux armements — stratégie globale où des gens peu médiatisés comme Paul Nitze ont joué un rôle au moins aussi important que des Kissinger et Brzezinski —.
            Le résumé ci-dessus à propos de 1914-18 peut donc être reporté pour 1939-45 et la suite. Il est possible que plusieurs personnes ne saisissent pas tout de suite, par exemple, une certaine similitude entre le recrutement de travailleurs français contre des travailleurs allemands et le recrutement de travailleurs français contre des travailleurs algériens. Auprès de ces personnes, il est vain de tenter de faire voir que la manie économique est vraiment d'un ridicule insondable vis-à-vis de la compréhension politique, et que la compréhension politique passe par celle des réactions animales, primo d'appartenance à une horde, secundo de désir incessant de décharge agressive.

                        Il est drôle, mais surtout sinistre, qu'il faille rappeler la nécessité de mise à jour par savoir et raison, par l'expérience-science-et-histoire, au pays où une Révolution est issue d'une prise de conscience extraordinaire, grâce au travail de ceux qu'on a appelés les Encyclopédistes. Il est drôle, en pareil sens, que (comme Marx, qui ne mentionne jamais Diderot et la philosophie expérimentale) même dans ce pays on oublie ce qu'a représenté pendant les Lumières le bousculement de toutes les scléroses mentales, par la description et la diffusion de la connaissance historique et scientifique— jusque chez des privilégiés : a fortiori chez des opprimés encore peu cultivés, mais vite avides de saisir toutes les justesses qui fondent et soutiennent leur révolte —.
            Une telle perte de mémoire est ridicule, et du ridicule au crime il y a seulement ce pas, qui consiste en l'entretien de l'ignorance, par des catéchismes — divers, certes, et il ne s'agit pas d'en oublier : mais il y a un catéchisme actuellement bien plus dangereux que les autres, parce qu'il refuse les leçons de l'histoire en prétendant s'y appuyer, et qu'il entretient ainsi l'illusion d'un messie prolétarien dans un monde d'automates et de robots, au lieu de mener campagne aussi auprès de médecins et d'infirmières écrasés de surmenage en hôpitaux publics, d'employés de bureau ou commerce obligés pour trouver un salaire de collaborer à des administrations d'oppressions et gaspillages, d'enseignants harcelés de programmes délirants, etc. etc.

                        Or ces jours-ci, on réentend trop fort les malades dominants à mentalité de primates qui mènent les guerres, parce qu'ils sentent, à juste titre, qu'ils sont incapables de gérer la paix. Ces malades se déchaînent plus spécialement en US-UK-UE ("United" : States, Kingdom, Europe, c'est la même houlette). Le prétexte — comme chacun peut vérifier aisément à partir à la fois de mille sources mondiales et simplement des risibles contradictions britanniques sur l'affaire Skripal —, c'est du gaz qui aurait fait des victimes tout à coup inadmissibles. Bien qu'il soit peu utile de tenter de faire raisonner les abrutis, qui entrent en résonance avec n'importe quoi pour s'indigner et se ranger vertueusement sous les immondices qui les gouvernent, on doit dire et répéter par exemple que Saddam Hussein, quand il était utile aux ordures de Washington (notamment ami-ami avec Donald Rumsfeld), gazait des opposants (en particulier kurdes) sans que ni Washington, ni Londres, ni Paris, ni Berlin, ni autres, Moscou inclus, n'élèvent à l'époque la moindre voix contre la mort atroce de milliers et de milliers d'êtres au moins aussi humains que Skripal et tout semblables à ceux saisis dans les affres d'une agonie atroce, sur des photographies exhibées en fait par les pires criminels de guerres, coloniales (Viet-nam) et autres, que l'histoire ait jamais connus.

                        Il y a du danger à faire trop penser à la guerre, sans rappeler qu'il ne faut surtout pas oublier des luttes plus immédiates — SNCF et étudiants, pour dire vite ce qui risque de toucher des lecteurs français en ce moment —. Mais ce n'est pas pour oublier ces luttes, c'est pour les faire radicaliser.
            Car il y a aussi du danger, et bien plus grand encore, à laisser oublier que les privilégiés des années 1910 et 1930 ont commencé par mener des rhétoriques délirantes de guerre, et puis la guerre elle-même, pour maintenir leurs privilèges,
ET QUE, CHAQUE FOIS, ÇA A MARCHÉ.
            Les aveugles n'en déduiront jamais ce qui saute aux yeux, à savoir qu'il faut
INDISSOLUBLEMENT
dénoncer toute propagande de guerre (extérieure) en même temps que mener par tous moyens la lutte (intérieure) contre les privilèges.
            Il y a en France en ce moment des réunions pour des grèves, dans les gares et les universités. Il urge de les faire converger.

                        Ceux qui ne vont jamais nulle part à temps n'ont pas besoin d'y penser davantage.