bienvenue, welcome, welkome,etc

Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


jeudi 16 avril 2015

Act83 Sur les "fins"


Il est tout à fait juste de tenter de réveiller les citoyens de la narcose médiatique. Il n'est pas sûr que les alternances d'alarmisme, triomphalisme et catastrophisme constituent de bons moyens d'y parvenir.
Un site souvent plus que respectable, proposé en lien depuis ce blog, a affiché sur de longs mois de l'an passé : "Death of the dollar 2014". Or au début 2015, le dollar et donc la livre britannique ont retrouvé leur plus haut niveau par rapport à l'euro, tandis que celui-ci achevait de couler par rapport au franc suisse. Le fait monétaire n'a certes rien de réjouissant — c'est un indicateur effroyable de la puissance relative, de ce qui est encore un peu humainement contrôlé, vis-à-vis des mafias, des maffinances qui triomphent aujourd'hui — : mais il n'est pas plaisant que s'y ajoute le ridicule de gens qui par ailleurs diffusent souvent des faits, essentiels à la compréhension de la déchéance présente. Si l'on veut inspirer confiance, il faut éviter de se poser en prophète, surtout si c'est pour étaler des prophéties dont l'absurdité ne tarde guère à éclater.
C'est d'autant plus grave qu'à force de mentalité scoop, on aide à faire confondre des sottises avec des affaires d'une extrême gravité. Les annonciateurs de la "fin" du dollar, dont on vient de parler, ont publié des masses d'articles souvent remarquablement documentés, plus angoissants les uns que les autres, sur les provocations et le coup d'Etat néo-nazis en Ukraine, et sur la manipulation par l'OTAN des foules dans ce malheureux pays. Or quand on voit la mappemonde d'un peu plus haut, il n'est pas évident que ce soit là le cœur du drame énorme où l'humanité entière est menacée : il faut voir l'Asie centrale, les hydrocarbures et la remontée des frontières vers Moscou depuis les anciens Etats musulmans d'Union Soviétique, aussi bien que les hydrocarbures un peu plus bas autour de la Syrie puis de l'Arabie — et il ne serait pas mauvais de voir le fond, que les hydrocarbures ne sont qu'un aspect de la lutte pour l'automatisation à outrance, la politique de chômage imposé et par là l'asservissement des peuples par les technologies, dans une politique générale de volonté de pouvoir à tout prixl'économie est à peine un relais, jamais en elle-même un moteur —. En tout, du côté de l'Ukraine, effectivement il y a menace gravissime pour la vie et l'espèce humaine à l'échelle de la planète, mais il est navrant que cela soit rangé à côté de divagations sur les monnaies.

Là-dessus, des textes de déjantés sur la science ne peuvent pas aider à voir clair. Or tout récemment on a vu passer des avertissements, sur ton prétendument tout ensemble affolé et docte, à propos d'expériences du CERN (Centre Européen de Recherches Nucléaires), où il est question que le gros anneau installé près de Genève déclenche la "fin" de notre part d'univers — rien que ça. Ce qui suit va demander un peu de méditation, au lieu de la simple aptitude à se laisser effrayer, mais l'idée qu'on se fait ici du respect du lecteur exige aussi davantage que le simple effroi.
Pour autant qu'il soit possible de donner idée de l'affaire en quelques lignes, la physique contemporaine mène, dans un empirisme souvent révoltant, des séries d'essais destinés à rapprocher du rêve einsteinien et scientifique : la conception unitaire qui rassemblerait dans une même synthèse les extraordinaires nouveautés, quantiques, dans le "microscopique", et les extraordinaires nouveautés, de description plus directement relativiste, dans l'astrophysique et le super-"macroscopique". Autrement dit, dans le principe le domaine de recherche du CERN est synonyme de science. Mais hélas dans ses menées effectives, c'est une négation honteuse des exigences de compréhension et rigueur sans lesquelles ce nom de science est purement et simplement volé. On va tâcher d'expliciter un peu les deux volets de ce diptyque maladif.

Le plus simple est sans doute de partir d'un exemple. Il y a dans les classifications encore actuelles de la physique quatre types de processus  longtemps étudiés de façon séparée : le gravitationnel, l'électromagnétique, les phénomènes radioactifs dits faibles, et les forts. Bien sûr il faut en avoir une vue unique, alors que les abords expérimentaux les présentent d'abord comme indépendants les uns des autres. Les tâtonnements — dont une bonne part au CERN, justement — ont amené à voir assez rapidement que l'électromagnétisme et l'interaction faible n'étaient que deux expressions d'une même réalité profonde, au point qu'on parle aujourd'hui d'interactions et courants électrofaibles. A la racine de tout cela, il y a une description d'une part à l'aide de ce que tout le monde appelle des particules, alors que (du moins isolé) ce mot n'a aucun sens en la matière, et d'autre part à l'aide de ce que tout le monde appelle des champs, alors que (du moins isolé) ce mot n'a aucun sens en la matière : nul n'a su encore, en effet, éclairer proprement que les phénomènes de base de la nature ne peuvent être conçus clairement ni en termes d'ondes ou champs, ni en termes de particules, les uns et les autres étant de simples images tirées d'espaces continus sans réalité assez précise. C'est le problème central légué par Einstein, qui a compris mieux que tout autre de son temps, et mieux que presque tous les physiciens du nôtre, le manque de fondations assez solides à nos théories physiques.
Seulement les théories, aussi bien des physiciens derrière leurs vanités patamathématiques, que surtout des "industriels", sont des choses dont les Etats et pouvoirs se foutent complètement. La "théorie" électrofaible a beau être bancale dans ses "grosses coutures" comme disait Feynman, elle éveille des espoirs fous. Car un des gaspillages les plus considérables des centrales dites nucléaires est le passage par des processus mécaniques de la chaleur produite par les réacteurs : seule une partie de l'énergie fournie par l'uranium devient d'abord mécanique (des turbines) et ensuite électrique (par les alternateurs accolés aux turbines). L'électrofaible pourrait donner le passage direct de "la" radioactivité à l'électricité, en court-circuitant l'énorme ferraillage de machines à vapeur puis d'alternateurs des centrales actuelles. On devine l'intérêt pour les consommateurs d'énergie et utilisateurs de robots au lieu d'ouvriers : le pétrole peut bien finir, si le "tokamak" (la machine directe radioactive-électrique) fonctionne on s'en fout.
D'où les énormes investissements en ces affaires, où on ne sait même pas de quoi l'on parle (ni "ondes" ni "particules"), mais d'où l'on peut faire des armes nouvelles, civiles et miltaires, contre tous les peuples. En fait l'exemple ci-dessus est dépassé dans le détail, mais tout ce qu'il y a d'actuel dans le principe.
Ce ne serait déjà pas mal pour comprendre les dépenses du côté de ces perversions à retombées techniques immédiates, contre la science et contre les gens. Or il y a beaucoup plus fort dans ce détournement du fruit du travail par les Etats notamment capitalistes — un des pontes de cette fausse science a appelé avec insolence ce détournement "le soutien sans faille des contribuables" —. Car on a fait du chemin, mais dans la même incohérence, en direction de la synthèse des quatre "interactions" connues de la nature. Du coup, on est peut-être déjà capable de recréer des conditions de début de notre part d'univers, où la distinction entre ces divers aspects n'existait qu'en germe. Ce sont des conditions à nos yeux extrêmes où toutes les valeurs — de ce qui se traduit ensuite par exemple en densité, pression et température — n'ont plus de signification pour le profane. Ces états mal imaginables se retrouvent dans les "trous noirs", les sortes d'aspirateurs du cosmos qui rongent même l'espace et le temps à force de ramasser la "matière".
Quand on a passé un peu de temps avec des physiciens, et surtout les gens qui se retrouvent à la direction du CERN, quand on a pu vivre la stupéfaction, de leur ignorance des exigences théoriques scientifiques et de leur insensibilité aux retombées humaines, ce qui précède suffit à avoir peur. De là à publier un article sur la "fin" du monde, comme il s'en est vu récemment sur un des sites "alternatifs", il y a saut d'un risque, très réel mais très mal délimité, à l'absurdité de mauvaise science-fiction qui fait de l'accélérateur du CERN la création potentielle d'un "trou noir" qui anéantirait la Terre, et tant qu'à faire notre galaxie et notre métagalaxie tout entières...

C'est dans un esprit de compréhension globale et d'intelligence générale qu'il faut creuser ces zones. Il ne faut ni se laisser bousculer par les cinglés au pouvoir, potentats d'Etat ou de groupes financiers dits industriels, ni par les autrement cinglés qui se précipitent pour vous "alerter" dans le sens d'autres égarements. L'état du monde mérite en même temps la rationalité exigeante d'Einstein comme de Lorenz, et celle de Martin du Gard comme de Camus. Nul ne prétend que ce soit facile. C'est seulement indispensable.

mardi 14 avril 2015

Act82 Totalitarisme et technologie


La stupidité des expressions en termes de lutte "des classes" prend désormais des proportions angoissantes. Car d'un côté on entend clamer, à juste titre, l'urgence d'agir pour éviter à l'humanité de courir à sa perte ; et de l'autre côté demeure inamovible le refus du renouvellement dans la compréhension. Or sans cette base d'accord rien ne peut être mené de façon assez large et puissante, dans la réunion d'assez de gens, assez de forces.
En particulier, l'écrasement des élans démocratiques par les nouvelles technologies est un cas remarquable de ce que les pouvoirs financiers parviennent à faire, tandis que leurs victimes restent désarmées dans leur ignorance. Ainsi, l'un des résultats de la barbarie par chômage imposé est que des masses de gens peuvent être recrutés en "conseillers" techniques ou commerciaux, et gagnent leur vie en infectant les autres de processus d'arnaques et harcèlements — par exemple au service des banques et assurances ou des "fournisseurs d'accès", quand ce n'est pas en participant à des escroqueries avec abus de faiblesse comme on en voit de plus en plus fréquemment —. Est-il facile pour de tels "travailleurs", qui sont légion et en croissance, de s'intégrer à une "classe" ouvrière ? C'est en face d'eux, non à leurs côtés, qu'il y a encore des gens de contribution sociale incontestablement positive : mais de moins en moins. En tout alors, les citoyens sont-ils de plus en plus solidaires, soudés en classes ? Où y a-t-il solidarité, même ouvrière, aujourd'hui ? quand voit-on manifester ensemble les ouvriers indiens et chinois, voire en France seulement algériens et français ?

De toujours mais de plus en plus en ce moment, la constitution en classe est le fait de dominants. L'extraordinaire poussée révolutionnaire venue de deux siècles n'a pas été utilisée par les progressistes comme elle aurait dû l'être : en partie par ignorance inévitable ("notre révolution est très mauvaise", disait Lénine, "mais la première machine à vapeur l'était aussi"), en partie à cause de l'atroce incohérence due à la rétrovolution hegelienne, à l'encontre de la diffusion resplendissante de savoir qu'avaient voulue et largement réussie les Encyclopédistes. Les débuts de constitution d'un prolétariat n'ont pu résister aux forces omniprésentes de volonté de pouvoir, d'agressivité. On l'a montré ici et ailleurs mille fois, en particulier à propos du choix primitif, primatif, de horde qui a permis la guerre mondiale en 1914 au profit des brutes, alors que l'intérêt de tous les peuples, de l'humanité entière, proclamait les nécessités de la paix.
La reconstitution en Russie d'un système de pouvoir aussi féroce que le tsarisme n'est qu'une des conséquences de cette ignorance des priorités éthologiques. Non seulement l'agrégation en classe est surtout vraie chez les dominants, mais elle se manifeste plus nettement chez ceux que le système sert, ou au moins ne dessert pas trop clairement. La sinistre "réhabilitation du travail manuel" venue du giscardisme a eu pour écho direct les hommages à "la France qui travaille" du sarkozysme aux Halles de Rungis : il s'agit de pousser toujours à la considération pour des gens insérés dans le système de fric et qui y trouvent leur compte, à l'opposé des valeurs incomparablement plus humaines de culture et travail véritables. On entend bien des Français se réjouir d'être chauffés au fuel-pas-cher, "grâce" à ce qu'on fait aux pauvres dans les pays où il y a beaucoup de réserves de pétrole. Dans une certaine mesure, ce ne sont que retombées populacières de ce que le même sinistre a appelé "la France que j'aime", à savoir la racaille de parvenus mafieux, chaleureusement accueillis par la finance parce que l'argent sale lui est une ressource centrale.
La ligne de force des dominants se place en tout et partout, mais s'amplifie : voici une ou deux générations, l'écrémage des meilleurs étudiants se faisait en faveur des écoles d'ingénieurs, qui pouvaient se targuer de contribution au progrès — car les 2 ou 3 % d'entrés en maternelle sélectionnés en vue des "prépas scientifiques" se référaient à des valeurs compatibles avec quelque démocratie —. Aujourd'hui, les sélectionnés équivalents se précipitent en "écoles de commerce", contradiction dans les termes : écoles et pancarte de savoir, commerce et exploitation d'ignorance, grossier savoir-faire. De même contre les "intellos" (en fait contre le savoir, cœur d'esprit démocratique), les citoyens enrichis de "classes moyennes" crient fort, et revendiquent la classique revanche des médiocres qu'est le sens supposé "pratique", "l'esprit" d'entreprise : en réalité, ils sentent qu'ils ne sont pas bons à grand'chose hors système de fric, et ils ne veulent pas entendre parler (comme bien des ouvriers) d'un essentiel — à savoir que le sens civique, le sens humain véritable, exige qu'on accepte d'apprendre un peu d'histoire et des très grands courants des sciences, si on veut être capable de juger de ce que sont et font nos politicards et leurs nervis matraqueurs ou médiateurs.
Ce n'est pourtant une insulte à personne que de demander aujourd'hui à un artisan de se rappeler un peu ce qu'a représenté pour l'instruction populaire la Convention en 1793, et au contraire l'enseignement par les Congrégations catholiques. Si ledit artisan prend cela comme une injure, ce n'est pas seulement de sa faute, il est vrai : il a certainement été formaté par l'Eglise dans ce but. Mais qu'il n'en fasse pas reproche à ceux qui savent de l'histoire. Qu'il lui arrive parfois plutôt de respecter le savoir, typique de l'humain, au lieu du simple statut social et du pouvoir des gros richards puants : ces sadiques ont régulièrement envoyé ses ancêtres au massacre militaire et ensuite, pour conserver assez d'esclaves, ils ont recruté en masse d'autres malheureux — ces nouvelles victimes qu'ils lui apprennent à haïr sous le nom d'immigrés en vagues successives, Italiens, Polonais, ensuite venus de toujours plus loin, toujours plus pauvres —. Qu'il lui arrive parfois de respecter Mohammed au lieu de se moquer de lui pour se sentir du clan dominant, et qu'il crache au contraire à la face des "patrons de patrons", héritiers des criminels contre l'humanité de l'UIMM, assoiffés de sueur et de sang tout au long des temps initiaux de la révolution industrielle, et responsables des guerres monstrueuses qui ont éliminé tant de ses ancêtres comme de ceux de Mohammed. Ce n'est une insulte à personne de demander qu'on comprenne un peu, enfin, quelque chose à la politique et à l'histoire.

C'est plus difficile, certes, que de se laisser entraîner dans l'infamie animale et grégaire. On devient facilement maire et corrompu, à Hayange et ailleurs, en passant de Lutte ouvrière à l'afFront nazional : mais on ne quitte pas pour autant les zones d'incompréhension, on s'y enfonce seulement davantage. De même, des sociologues souvent respectables par leur travail se sont donné voici trente ans le ridicule d'aller applaudir un Georges Marchais, type du parvenu traître et infect : et ils s'étonnent aujourd'hui, dans un bus de transport ouvrier, de n'obtenir aucun écho parmi les représentants de la "classe" qu'ils ont cru défendre toute leur vie. C'est cruel. C'est bien fait : le parti auquel ils ont adhéré n'a cessé de trahir les ouvriers et de conduire à la disparition définitive de ce qui aurait dû être constitué en classe — alors que les marxistes comptaient sur la Parole sacrée, prophétisant de par l'histoire la venue par grâce, toute seule, du Messie prolétarien.
De même encore, il existe bien des médecins (surtout généralistes, qui ont refusé le carriérisme) et bien des enseignants (surtout instituteurs et c'est au fond pareil) qui sont prêts à soigner et éduquer des ouvriers et des musulmans : les soins du corps et de l'âme recrutent souvent dans les mêmes qualités humaines. Ces médecins, ces instituteurs, ne sont disposés pour autant ni à subir la dictature dialectique du Politburo supposé représentant ouvrier, ni à se convertir à l'islam d'une autre sorte de fanatiques supposés représentants musulmans. C'est de tous les opprimés, de tous les exploités, conscients et inconscients, qu'il faut faire force contre les immoraux, les inhumains du pouvoir. Diderot, Voltaire, Rousseau n'étaient pas de "classes" délimitées, et si même Diderot était loin d'assez d'ouverture humaine et de distance aux préjugés effroyables de son temps, du moins a-t-il su mener l'essentiel : diffuser non une horreur de Verbe, une dialectique, une nouvelle source de tricheries de pouvoir, mais le savoir, le plus possible.
Nous avons à refaire le même boulot. Pour trouver l'équilibre et la paix, il faut la compréhension par la connaissance, historique et scientifique, il faut sans cesse refuser l'inhumanité du pouvoir, il faut comprendre, malgré les perversions et gadgets de notre temps, comment l'humain peut dépasser son héritage de pulsions animales. Seuls les humains peuvent accéder au savoir, et il faut le savoir pour tous : d'autant que parmi les nouvelles technologies, les plus terribles sont celles de manipulation-fanatisation des foules — media, infiltrations, espionnages, gangs installés en armées par CIA-MI6 — où la connaissance éthologique joue le rôle qu'on a tant dit ici même. Mais qui y aura songé en lisant ce titre-ci ?

mercredi 1 avril 2015

Actuel 81 Germanwings 9525, Bowe Bergdahl


MÉPRIS 1. "Personne ne tient ce discours-là", disait récemment un consciencieux spectateur de TF1 & Co, entendant avec un effarement mêlé de dégoût quelques réalités concernant le crash de l'Airbus de Germanwings dans les Alpes. Personne, en effet : <mondialisation.ca>, <agoravox>, <mediapart> même, pour ne parler que de quelques sites en langue française, ont tous publié des articles plus ou moins décents, mentionnant parfois le conflit entre les dirigeants à haut prix et les employés à bas prix de la filiale low-cost de Lufthansa. Mais ce ne sont que divagations : on y envisage le MÉPRIS général, du travail dans "l'entreprise" et puis des êtres, même de la vie d'enfants ! De la philosophie : ça ne compte pas, ça ne s'écoute pas, enfin ce n'est personne. Il peut bien y avoir à la maison un ordinateur et l'accès à des sites "alternatifs", il ne sert qu'à des jeux avec podcasts, puis à quelques coups d'œil subreptices sur des sites porno : autrement, on écoute TF1 et associés, et avec ça on est moderne et informé. Les ennuis et tensions au travail ou en famille sont oubliés, négligés, et surtout jamais médités : cela évite aux employeurs que trop de têtes se relèvent — d'affreux "conspirationnistes", ouh ! parmi lesquels on serait terrorisé de se voir ranger...
Ainsi le dieu-pouvoir fait l'homme-esclave à son image. Howard Zinn raconte que, lorsqu'on réussit à rappeler un peu d'histoire aux pauvres des Etats-Unis, noirs et blancs, on se fait répondre avec une surprise non feinte : "je ne voyais pas les choses comme ça !" Extraordinaire : ce qui s'est passé, souvent connu en partie par les victimes, est d'abord considéré comme une vision étonnante des choses. Plus l'oppression est totale, totalitaire, plus l'animalité de primate prévaut sur la raison, l'humain : c'est le dominant fort en gueule qui dicte la façon, non seulement de se conduire, mais d'éprouver. En France, on déclare que "voter est un droit, c'est aussi un devoir civique" : au sens de qui ? comme l'instruction civique, qu'on recevait un peu en second cycle de l'Instruction Publique, ou au contraire comme le service d'action, civique qu'il disait, du mafieux Pasqua après mai 68 ? Quelle question ! "Personne", sans doute, "ne tient ce discours-là"...
Redite : dans l'un de ses plus beaux éditoriaux du journal Combat, Camus rappelait la nécessité absolue en démocratie d'interdire la possession de la presse par des groupes financiers — il évoquait ce qu'était "la honte de ce pays" : les journaux de la fin de Troisième République et du temps de Pétain le traître —. Que dirait Camus aujourd'hui ? Que vaut le soi-disant suffrage, abruti sous la coupe de TF1 et pareils ? Quelle signification de volonté populaire ont des bulletins d'urnes sous contrôle de manipulateurs et menteurs de profession ?
Silence, on vous dit : "personne ne doit tenir ce discours-là" !

MÉPRIS 2. Bowe Bergdahl n'est sans doute pas, lui non plus, dans les discours des bien-pensants, bien-parlants. C'est le nom d'un soldat US qui, en Afghanistan, a été écœuré de la mentalité des brutes qui le commandaient, et parfois l'entouraient. Les êtres humains, nés dans le pays où il était envoyé, lui ont paru humains : dignes d'aides au lieu d'insultes. Ayant assisté à un "incident" particulièrement révoltant (des enfants renversés dans la poussière des rues, avec le MÉPRIS convenable, par des camions blindés de la plus impériale armée du monde), il a tâché de joindre un officier supérieur éloigné de son unité. Capturé par les "Talibans", durement traité, il a été réclamé puis échangé contre des "insurgés" par Washington, qui pensait en faire une grande victoire diplomatique. Or Bowe Bergdahl n'a pas changé de discours pendant sa très courte "libération" — car il s'est retrouvé emprisonné dans les geôles de son propre pays : il a osé maintenir que les Afghans sont, dans le principe et souvent la réalité, humains... et les officiers US, dans les faits, nettement moins.
Bergdahl est donc envoyé en conseil de guerre. Mais mieux : les "faucons", ou comme on dit fort bien en français les néocons, aux Etats-Unis, réclament que les charges contre lui soient rédigées de façon assez forte ("désertion devant l'ennemi") pour permettre la peine capitale. Contre les gens au feu, les lâches bellicistes sont toujours féroces, depuis le calme des bureaux ministériels où ils rampent devant leurs commandants de carrière.
Réalité pérenne. Tout le monde qui veut savoir sait qu'un président des Etats-Unis fut assassiné pour défi aux profiteurs de guerre de son pays. Mais il faut le réentendre plus précisément déclarer, dans l'époque de la rivalité avec l'URSS :
"We all inhabit this little planet.
We all breathe the same air,
we all cherish our childrens's future
— and we are all mortal"
(Nous résidons tous sur cette petite planète. Nous respirons tous le même air, nous chérissons tous l'avenir de nos enfants — et tous, nous sommes mortels).
Cela, au temps où les "communistes" étaient, pour les mass merdia de la finance et de la honte réunies, ce que sont devenus les "islamistes" aujourd'hui. Non mais ! Les Russes, des humains comme "nous" ! et pourquoi pas les Afghans, alors !

Si ça continue comme ça, les "conspirationnistes" vont bientôt exiger qu'on examine la répartition des richesses, nationalement et internationalement, le coup d'Etat néo-nazi en Ukraine, la guerre en Syrie, la déclaration d'Obama rangeant le Venezuela parmi les grands dangers contre "la sécurité des Etats-Unis", les crimes de guerre en Afrique, bref la politique, à la lumière de l'humanisme voire des données scientifiques ! Doux Jésus !
Personne ne doit tenir ce discours !