bienvenue, welcome, welkome,etc

Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


vendredi 22 novembre 2013

Actuel 58 JFK, Garrison, d'un quart de siècle à l'autre


Le 22 novembre est là, avec le cinquantenaire du meurtre de John Kennedy : il faut encore contrer le fatras d'ignominies dont les media de la finance veulent inonder les cervelles. La leçon, on va le voir, porte loin.

Au fond de toute l'affaire, il faut la référence à quelque chose qui mérite d'être appelé la vérité, qui est essentiel et global — donc opposé aux propagandes, aussi bien qu'aux détails martelés quotidiennement sur politicaillerie-turpitude-spectacle, "sport"-dopage-spectacle, et autres grossissements sur rien-spectacle —. Cette vérité est toujours plus précisément définie, par un savoir historique et scientifique en perpétuelle expansion.
C'est une valeur très importante, très haute pour ceux qui croient à humanisme et démocratie. Bien sûr c'est contraire aux media, de la finance en particulier : mais même des sites comme GlobalResearch abondent en "nouveautés" qui ne citent jamais l'ouvrage modèle de Garrison (On the trail of the assassins, publié voici un quart de siècle — 1988 — et constamment rappelé dans ce blog : cf. notamment Archives A3).

Pour renouveler donc un peu le plaidoyer en faveur de ce livre — à coup sûr l'un des plus notables du XXe siècle — et pour inciter à sa relecture aussi régulièrement que pour le 1984 d'Orwell, voici de brefs extraits d'une interview donnée par l'auteur à Playboy (vol. 14 n° 10, octobre 1967, donc plus de vingt ans avant la synthèse qu'on vient de citer).
En un sens, très réel et terrifiant, notre gouvernement c'est CIA et Pentagone, le Parlement (the Congress) étant réduit à un cercle de discussion [...]
J'en ai assez appris l'an passé sur les machinations de la CIA pour savoir qu'on n'a plus ici l'Amérique de rêve à laquelle j'ai cru. Les impératifs de l'explosion démographique, qui presque inévitablement diminueront notre croyance au caractère sacré de la vie humaine individuelle, combinés à l'angoissant pouvoir de la CIA et de l'establishment de la Défense, semblent voués à sceller le destin de l'Amérique que j'ai connue enfant  et à nous mener dans un nouveau monde, orwellien, où le citoyen existe pour l'Etat et où le pouvoir brut justifie tout et n'importe quoi en affaires d'immoralité. J'avais une sorte de réflexe naturel de confiance dans l'intégrité de base de mon gouvernement, quelques gaffes politiques qu'il fasse. Mais j'en suis venu à réaliser qu'à Washington, le fait de tromper et manipuler les gens est considéré par certains comme prérogative naturelle de l'administration. Huey Long a dit : "Le fascisme arrivera en Amérique sous le nom d'anti-fascisme." J'ai peur, sur la base de ma propre expérience, que le fascisme arrive en Amérique sous le nom de sécurité nationale.
Certes d'abord tout le monde sait que Huey Long fut un concurrent dangereux pour Roosevelt, beaucoup plus démocrate et radical que lui, et donc bien autrement dangereux pour les milliardaires US : par un des grands "hasards" dont sont friands les "conspirationnistes", il fut éliminé par assassinat (chose inimaginable aux Etats-Unis !) en 1935. Les pros de l'époque firent d'ailleurs mieux que ceux de 1963 : au lieu que le pouvoir se risque à des évènements subséquents mal contrôlés comme ce fut le cas avec Oswald et Ruby entre autres, le meurtrier fut exécuté sur place dès son crime accompli, ce qui évita les bêtises du genre enquête, Commission Warren etc. Nous nous garderons d'insister sur ces faits aussi bien connus qu'éclaircis — et de façon générale sur les abondantes et remarquables références, politiques, historiques, bibliographiques, qui enrichissent le travail de Garrison parmi des formules de synthèse d'une audace et d'une netteté incomparables, assises sur des avalanches, des cascades, des cataractes et des déluges de faits.
Peut-être, par contre, nous sera-t-il pardonné de souligner une fois de plus que les rêves répressifs des totalitaires de la maffinance-CIA-Pentagone ont pu être réalisés après le "nouveau Pearl Harbor", le 11 septembre 2001 : au nom de cette "sécurité nazionale" que soulignait à l'instant Garrison, Patriot Act & Co permettent désormais aux autorités des USA d'espionner-couvrir de calomnies-arrêter-torturer-exécuter LÉGALEMENT tout "dissident" à l'intérieur ou à l'extérieur des frontières du super-Etat, en toute tranquille et absolue contradiction avec les lois internationales. Il semble même (c'est techniquement plus que probable) que l'utilisation d'un simple téléphone portable suffise maintenant à permettre de repérer un mauvais citoyen et à l'expédier ad patres par minidrone : on n'arrête pas CE progrès...

Cela pour les traditionnels du pouvoir US. Mais d'où vient, en face, l'invraisemblable silence des sites "alternatifs" sur le fondamental Garrison ?
(1967) : notre gouvernement c'est CIA et Pentagone, le Parlement (the Congress) étant réduit à un cercle de discussion...
Une telle formule vaut des centaines ou des milliers de pages dans lesquelles se plaisent à parader des écrivassiers empressés : car ce genre d'accaparement du pouvoir n'est pas vrai seulement aux Etats-Unis. C'est là quelque chose d'autrement pertinent, net et direct que des verbalismes sur Etat profond et Etat public. Ainsi, comme en bien d'autres domaines historiques et scientifiques (tous fort importants pour la définition de la vérité), on est pénétré par l'impression que des flots de médiocres évitent à tout prix de citer les auteurs qui comptent — "on ne brûle plus la vérité, on la noie" —. C'est que la comparaison serait trop écrasante pour eux : ce à quoi ils songent, c'est se vendre, et cela laisse peu de place à un idéal auquel pourtant leur public aspire ardemment. Et voilà comment, en plus des francs salopards des mass merdia, on a un système de modes et modernités construit pour égarer, écarter des leçons les plus sûres.
C'est, au fond, le principe même de "l'actualité"...

Pour revenir aux pures brutes, on comprend bien leur attitude sur Garrison : merveille de rigueur et de conviction, éblouissant toujours de sincérité, son livre ne peut avoir pour réponse chez les officiels officiant que l'insulte, l'accusation ignoble de mensonge par des procureurs accumulant en fait eux-mêmes les faussetés et les calomnies. Car dans la culture des "losers" et winners", il s'agit seulement d'avoir l'air assez énergiquement sûr de soi pour emporter l'adhésion — il est au contraire bien dangereux, quand on veut se ranger auprès du pouvoir, de revenir à quelque réalité —. Mieux vaut donc, pour mentir, la hargne nue et l'incitation à la haine directe, dans l'indifférence à toute cohérence, ainsi qu'il est bien clair éthologiquement : le tout est d'inciter son lectorat au réflexe animal par un ton polémique et de désigner finalement des cibles à la fureur et à la lâcheté, sans s'occuper de logique. C'est le principe de propagande totalitaire : ainsi anticommunisme, anti-islamisme, ou procédés F-haine et Alain Soral mêlant, hachées menu, la pure ordure et la référence sociale ("national"-socialisme). Après quoi il ne reste plus qu'à compter sur le réflexe paresseux dit réflexe Charlotte Corday — cette bonne catholique qui refusait de lire Voltaire et Diderot de peur d'avoir à raisonner sur ses convictions, et qui préférait de beaucoup se précipiter pour assassiner Marat et aller tout droit au Ciel...
C'est ainsi qu'on peut tirer des fous, des crétins et des ignares (en Cinquième République ou aux USA, cela fait du monde) vers l'extrême droite : et ça marche — quand on sait ce qu'éthologie politique et mouvement grégaire d'humains veut dire, qu'est-ce que ça marche !
C'est depuis longtemps comme ça, et souvent : on entraîne bien plus aisément des militants à agir en satisfaisant leur agressivité de brutes primitives, qu'en les poussant à raisonner et apprendre pour remplacer efficacement les chefferies. Même parmi les victimes les plus misérables, il y aura d'abord plus de monde pour se laisser recruter vers des crimes et des jouissances de sadisme sous prétexte de foi (nazionale, théologique ou dialectique), que pour oser le savoir et la raison, la désobéissance de la pensée...
En ces années 2010, il y a de nouveau beaucoup de ces mouvements. Mais avant qu'on enseigne et apprenne en masse de l'éthologie politique, combien de nouveaux gaspillages faudra-t-il ?

Deux touches encore.
L'une éthologique aussi, mais sur un fonctionnement psychique plus intime. Elle concerne une réaction vulgaire au fait qu'un auteur est grand, et que son livre est un chef-d'œuvre. Quand on a vu, dans l'histoire et dans la vie, de quelle jaune envie sont capables des gens lorsqu'ils se heurtent à une vraie supériorité, alors qu'ils sont au fond inaptes à certains approfondissements, on tient une cause assez forte pour à elle seule expliquer beaucoup de silences sur Garrison. Cela fait partie des choses à regarder en face.
L'autre affaire est beaucoup plus grave. On the trail of the assassins s'achève sur des notes bien tristes, autour du thème : "des bagatelles comme la loi écrite des institutions mêmes, sans parler de la morale et de la justice véritables, sont sans influence sur les pouvoirs notamment d'Etat". Certes il est très juste de faire toucher du doigt l'indifférence de base des violents à de simples rappels de valeurs, qui ne mettent guère en danger leur violence. Mais est-ce toute la conclusion à tirer de leur acharnement à l'inhumanité ? L'histoire est là pour montrer qu'il y a des Régimes qu'un jour on peut dire Anciens : ne peut-on y réfléchir activement ? la puissance des Lumières de la vérité et le courage des peuples, alliés à bien autre chose que des mots, n'ont-ils pas déjà donné des exemples pour changer les choses dans le sens de l'humain ?

lundi 4 novembre 2013

Actuel 57 Liens et sources, octobre 2013


Les choses changent vite sur la Toile, et parfois ce qui apparaissait voici quelques semaines comme une référence indispensable semble devenir moins intéressant. En outre, les difficultés à apprécier la confiance qu'on peut accorder à telle ou telle source (cf. Actuel 49) ne diminuent pas, tandis que de leur côté les lectures sur papier vont leur train pour aider à préciser ou confirmer. D'où, notamment en affaires de liens, des correctifs qui ont toutes les chances d'être de plus en plus fréquents.

*

A propos des sites :
Il est plaisant de constater la régularité de
http://michelcollon.info
du moins pour ses meilleurs côtés : car on a mal à voir que les héritages de la Russie, de la Chine ou de certaines traditions dialectiques maintiennent leur fascination... Source largement irremplaçable tout de même.
Même commentaire en gros pour
http://www.voltairenet.org
— sauf que des références chrétiennes, parfois un peu surprenantes, y sont accueillies —. Il semble aussi que des pressions extérieures, issues de relations avec des pouvoirs à l'Est, créent en ce moment des problèmes à la rédaction. Demeurent des données remarquables — parfois de fiabilité impossible à évaluer faute d'indication des sources — sur tout ce qui touche le monde arabisé, de même que sur les crimes et propagandes des administrations US.
Pour ce qui concerne
http://survie.org
c'est toujours remarquable sur la "Françafrique" (malgré le très regrettable refus de voir ce que font d'autres coloniaux, notamment anglo-saxons, même dans les pays traditionnellement liés à la France), et les leçons qu'on en tire continuent à éclairer des matières bien plus générales. Mais la ligne de ce site repose sur certaines illusions — par exemple imaginer que, quant à l'essentiel, le gouvernement actuel de la République pourrait être plus sensible que le précédent à des revendications d'équité pour les peuples d'Afrique — : cela conduit à se laisser berner, au moins en partie, par de minces lâchages de lest et des discours d'hypocrisie révoltante, alors que les pillages sur le continent subsaharien se poursuivent inchangés, ignobles. La résolution et la vigueur dans la dénonciation s'accommodent mal de certaines froideurs d'objectivité : un excès de telles fausses rigueurs fait par exemple le lit des complaisances du journal "Le Monde". Refuser de se distancier de certaines formes (en fait bourgeoises) est aussi le refus de la violence contre les violents : cela peut laisser place à beaucoup de choses justes, mais ce n'est pas assez.
Avec quelque regret on considère, ici et pour le moment, ne plus pouvoir maintenir la recommandation de
http://rebelion.over-blog.com
d'abord parce que la consultation du site est trop encombrée d'affiches de spectacles et chansons, ce qui fait perdre du temps et parfois désoriente, ensuite parce que l'apport de données est trop restreint. Dommage.
Au contraire, il y a du nouveau et du meilleur du côté de
http://mondialisation.ca
déjà pour le site en français, qui ne cesse de prendre de l'ampleur et de la variété, et davantage encore pour la mise en ligne en anglais
http://globalresearch.ca
qui est certainement la meilleure référence de site alternatif à l'heure actuelle par sa richesse et le soin de ses analyses. Si la réflexion par repoussoir était suffisante, on pourrait se contenter à cet égard de citer "wikipedia" : car évidemment l'inénarrable "encyclopédie libre" dit pis que pendre (et "conspirationnisme", parbleu !) de <globalresearch> ! Mais il est plus pertinent de constater qu'il n'y a nulle part plus complet, plus synthétique et donc plus juste, que ce soit sur la Tunisie et le monde arabisé en général, ou sur les crimes antidémocratiques des banksters gouvernants des Etats-Unis et de Grande-Bretagne contre les peuples du monde et d'abord contre les leurs propres.
Cette appréciation étant faite à l'heure présente...
Enfin, on maintient sans vergogne l'intérêt de consulter
http://a.avramesco.pagesperso-orange.fr
la comparaison des articles de la revue V&L à ce qui se publie aujourd'hui demeurant éclairante à plus d'un titre. Hélas...

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On voit sortir aussi en librairie énormément de choses, qu'il faudrait une équipe de documentalistes pour dominer un peu. Mais avec les moyens du bord, on peut recommander aujourd'hui au moins trois lectures, pour des raisons aussi différentes que possible :
1) de Hocine Malti, l'Histoire “secrète” (pas secrète du tout) du pétrole algérien (éditions La Découverte) ; du point de vue de l'éthologie politique, cela fait saisir comment un peuple entier, et de quelle importance, est corrompu par une situation de relatif privilège : la manne pétrolière du Sahara dans le contexte international ; il est particulièrement sinistre de voir là-dessus comment les Algériens, qui malgré cette ambiance épouvantable croient aux valeurs humaines, sont finalement contraints à l'exil, la lutte sur place étant rendue presque impossible par la barbarie du pouvoir et l'ignorance des masses
2) de Martin du Gard et Camus, leur correspondance parue pour le centenaire de Camus (Gallimard), ou comment la lucidité de deux des plus grands esprits du XXe siècle peut les mener à un pessimisme noir : chez Orwell de même, la prise de conscience qui suit la vision de "1984" peut conduire à la désespérance ; aujourd'hui au contraire la compréhension éthologique — grâce à l'examen du maniement du comportement humain par les crimes intriqués de torture, de massacres et de désinformation — montre les chemins, ardus mais sûrs, de la libération ; mais beaucoup de progressistes ne cessent malheureusement d'accumuler les plus épouvantables retards à propos de l'éthologie humaine, et ils en viennent ainsi à préférer les conforts du désespoir à l'apprentissage scientifique et donc réellement philosophique ; il est certes bien plus reposant d'enfourcher des illusions et des affects que de réfléchir et trier ce qui importe : mais c'est aussi beaucoup moins efficace humainement et historiquement
3) seulement pour ceux qui ont lu jusqu'à ceci : d'Alain Soral, "Jusqu'où va-t-on descendre ?" — car le livre est à l'image de son auteur et des mouvements d'extrême barbarie, ou comme on dit d'extrême droite, qu'il stimule : c'est effroyable d'incohérence sauvage mais, justement, très éclairant sur le succès de l'afFront Nazional jusque chez des descendants d'immigrés récents ; là encore, il est beaucoup plus reposant contre la nausée de ne pas lire et de ne pas savoir, et ainsi de demeurer impuissant contre la marée fasciste ; ce n'est pas l'attitude que recommande le blog de "Redire" : il faut saisir par des moyens scientifiques — qui laissent le moins possible de place à des sensibleries idéologiques — ce qu'est l'ennemi, pour pouvoir le dénoncer et le faire voir tel qu'il est, c'est-à-dire immonde et extraordinairement efficace dans la déchéance actuelle ;
c'est une autre façon de "redire" que l'éthologie humaine, politique, avec la connaissance fine de l'agressivité en particulier et de l'animalité dans l'homme en général, ouvre ses bras et ses outils à qui veut.

lundi 28 octobre 2013

Actuel 56 Des Mémoires d'un "complotiste"


Il était une fois, il y a très longtemps (1942-43), un Français assez fidèle à la France ou du moins à une certaine idée, pour refuser le protectorat anglo-saxon — et cela dans des circonstances autrement difficiles que celles du temps présent. Pour le contrer à n'importe quel prix, les déchaînés impérialistes de l'époque, spécialement US, cajolaient à tour de rôle
– Pierre Laval, qui se chargeait de la "prophylaxie" de la "race" en exigeant des Allemands la déportation même des enfants juifs,
  – Darlan, qui prétendait agir au nom du Maréchal en trahissant à la fois tout le monde,
  – enfin Giraud, qui était d'accord pour maintenir son pays dans l'asservissement, au profit d'une autre collaboration que celle déjà en place.
En outre, alors que partout dans le monde on savait vers qui se tournaient la plupart des Français — et beaucoup d'autres, surtout par comparaison aux fantoches poussés par des services de la perfide Albion et leurs homologues Outre-Atlantique — la presse prostituée aux gouvernants US-UK se livrait à de vastes intoxications : ainsi, dans la période dont il va s'agir, elle accusait le BCRA français (Bureau Central de Renseignement et d'Action) de torturer les Résistants pour mieux les soumettre à une discipline féroce. Ecoutons là-dessus de Gaulle (“Mémoires de guerre”, t. 2, “L'unité 1942-1944”, rééd. Presses Pocket, Paris 1980, p. 257 seqq).
« Après cette préparation sortit, soudain, “l'affaire Dufour”. Sous ce nom, un agent de l'“Intelligence”, recruté en France à notre insu, avait été amené en Grande-Bretagne par les Anglais dans le courant de 1942 et s'était présenté à la France Combattante en demandant à s'engager. » Démasqué par les Français, ce Dufour était emprisonné mais s'évadait avec l'aide anglaise. Puis en septembre 43, « Pierre Viénot, convoqué au Foreign Office, reçut à son sujet une étonnante communication. “Dufour”, disait par cette voie officielle le gouvernement britannique, “a déposé entre les mains de la justice anglaise une plainte pour sévices contre un certain nombre d'officiers français et contre leur chef : le général de Gaulle. En raison de la séparation des pouvoirs
qui, chez nous, est absolue,
le Gouvernement britannique ne saurait empêcher la justice de suivre son cours [...] Peut-être le Général pourrait-il arrêter l'affaire par un arrangement amiable avec Dufour ? Nous croyons devoir lui recommander d'y attacher une très sérieuse importance. Car
une condamnation est probable
et ce serait là, pour la presse, notamment celle des Etats-Unis, l'occasion d'une pénible campagne au sujet des méthodes et des procédés de la France Combattante”.
[C'était, poursuit de Gaulle, une] action d'assez basse inspiration. Evidemment, Dufour, agent anglais et déserteur français, ne m'intentait de procès devant les tribunaux britanniques que parce qu'il y était poussé par ses maîtres. Quant au gouvernement de Londres, s'il négligeait les accords signés par lui avec la France Libre et en vertu desquels les militaires français en Grande-Bretagne n'étaient justiciables que des tribunaux militaires  français, s'il déniait au Général de Gaulle l'immunité qu'il reconnaissait au dernier des secrétaires de cinquante légations étrangères, s'il essayait de m'intimider par la perspective de scandaleuses calomnies, c'est qu'il se prêtait à une entreprise politique destinée à dégager les dirigeants anglo-saxons d'une position devenue intenable. A l'opinion, qui les pressait d'adopter, à l'égard du général de Gaulle, de son gouvernement, de la France, une attitude digne de l'alliance, White House et Downing Street se flattaient de faire répondre : “Nous devons attendre jusqu'à ce que cette histoire soit éclaircie”.
Je décidais de traiter l'affaire sans le moindre ménagement. [...] Je chargeais Viénot de faire savoir au Foreign Office que je discernais le but de l'opération ; que celle-ci tendait à me salir pour justifier la faute politique commise par les alliés ; que je prenais la chose pour ce qu'elle était, c'est-à-dire pour une infamie [...] Quatre mois passèrent sans que Londres se manifestât autrement que par des avertissements épisodiques, auxquels nous ne répondions pas.
Mais au mois de mars, le complot [oh !] revint sur le tapis. Il faut dire que l'ordonnance relative au rétablissement des pouvoirs publics en France avait été adoptée le 21 mars [rappel par les gaullistes que de nouvelles autorités d'occupation, anglo-saxonnes cette fois, ne seraient pas plus habilitées que les précédentes à parler au nom du peuple français] [...] Le 28 mars, M. Duff Cooper [...] pria [Massigli] de me dire que
la justice anglaise ne pouvait attendre davantage,
que le Gouvernement britannique devait la laisser agir
et que le procès allait s'ouvrir. »
On imagine ce que serait aujourd'hui, en cas de chantage analogue, la réaction des parvenus de l'atlantisme prétendant parler au nom de la France. De Gaulle se contenta de répliquer par une menace, calquée sur celle qu'on lui jetait dans les pieds : un Français Libre était réellement mort, de mort violente, dans les locaux de l'Intelligence Service ; son fils décidait de porter plainte contre certains de ses officiers et contre les membres du Gouvernement britannique, y compris M. Winston Churchill ; de Gaulle ajoutait « que le Gouvernement français ne voyait aucun moyen d'empêcher la justice de faire son office et qu'il y avait malheureusement à craindre dans les journaux du monde entier, à l'occasion du procès, une fâcheuse campagne au sujet des méthodes et des procédés du service de l'Intelligence ». Et le général de conclure :
« Je ne sus pourquoi
la justice britannique renonça à suivre son cours,
ou comment le cabinet de Londres s'y prit pour l'arrêter
malgré la séparation des pouvoirs.
Ce n'était pas, d'ailleurs, de ma responsabilité.
Mais, de ce jour, je n'entendis plus jamais parler de “l'affaire Dufour” ».

Il est juste que beaucoup de circonstances de l'affaire qu'on vient de résumer sont autres que celles des guerres néocoloniales actuelles. Il n'en demeure pas moins et il faut rappeler, qu'à relire les aigres fureurs de Roosevelt notamment — se posant, lui à Washington, en défenseur des droits du peuple français contre de Gaulle —, on croit voir couler les larmes de crocodile des "Occidentaux" devant la misère des Irakiens face à Husseïn, des Libyens face à Kadhafi ou des Syriens face à Bachar-el-Assad. Il suffit d'ailleurs, on l'a dit ici, de voir par quoi on a remplacé Husseïn (ancien de la CIA, béni par elle quand il gazait les Kurdes) ou Kadhafi (sous qui les investissements en soins et éducation étaient les plus élevés, et la mortalité infantile la plus faible, de toute l'Afrique) et l'état des contrées en cause après l'intervention de l'OTAN, pour se dire que même le clan el-Assad est préférable aux "frappes chirurgicales" etc. des charitables chrétiens de l'Ouest.
Mais on doit aller plus loin. Il faut répéter ce que risquent les agents de la CIA auxquels on brandit leur signature s'ils s'avisent de laisser parler un peu de morale. Il faut se souvenir des conditions dans lesquelles l'avion d'un chef d'Etat a été interdit de survol de l'Europe occidentale, à la demande US, sous prétexte que se trouvait peut-être à son bord le dénonciateur de NSA Edgar Snowden. Il faut se remémorer les conditions dans lesquelles doit se séquestrer Julien Assange à l'ambassade équatorienne de Londres, pour avoir propagé des fuites mettant en évidence l'infamie d'espionnage US-UK. Ce mot d'“intelligence”, par lequel la langue anglo-USAïenne désigne le Renseignement, est significatif d'une perversion très élaborée chez les gens de pouvoir en général : les accapareurs ont eu "l'intelligence" d'investir dans les titres (féodaux ou de Bourses) par lesquels ils volent les profits et les rentes — ainsi toujours pour les privilégiés, tandis que les pauvres sont évidemment "les artisans de leur propre malheur" suivant la formule consacrée, les riches sont les gros et petits "malins" : en fait, c'est la prétention que le génie consiste à ériger le brigandage en mode de gouvernement, à oser toujours plus loin dans toutes les violences et toutes les hypocrisies, les dénonciateurs étant des "complotistes". Et c'est ainsi, l'histoire passant, qu'apparaît de Gaulle en humaniste relatif : d'abord élevé par la réponse du peuple à l'appel du 18 juin 1940, il s'est ensuite abaissé pour ressaisir le pouvoir en usant du coup d'Etat du 13 mai 1958. On ne doit oublier ni l'un, ni l'autre.
Seulement, à voir ce qu'est devenu le régime fondé par celui qui a choisi Pleven contre Mendès-France en affaires de finances, et d'Argenlieu contre Leclerc en affaires d'Indochine, il y a plus qu'assez de plus de cinquante ans de Cinquième République.

dimanche 20 octobre 2013

Actuel 55 Coups bas


Les bruits deviennent vacarme, en ce moment, d'espionnages d'Etats carrément illégaux : comme si déjà tous ceux illégitimes (échanges des "banques de données" commerciales entre autres) ne suffisaient pas. Ainsi — qui l'eût soupçonné ? — les services anglo-saxons, ensemble et séparément, se seraient livrés sur téléphones et ordinateurs personnels à des masses d'enregistrements : vraiment des masses, conservées sur des disques durs ultra-perfectionnés grâce à des prix Nobel de physique, aussi méritants que ceux de la paix et d'économie.
La réponse des CIA-NSA-MI-5 ou 6 n'a pas tardé : voilà-t-y pas que des Allemands et même des Français, voire d'autres obsessionnels du viol de la vie des citoyens, se seraient livrés à l'écoute de tout et de n'importe quoi. Décidément, on n'en finira pas de ces obsessions "conspirationnistes". A propos, savez-vous qu'on a publié les mels de la CIA recommandant l'emploi de ce mot, pour déconsidérer les chercheurs de vérité sur le 11 septembre 2001 ? C'est intéressant. C'est comme lorsque les familles des victimes du World Trade Center ridiculisaient la version officielle des attentats : dans une conférence de presse, une voix louée par les gouvernants US accusait ces familles d'attenter... à "la mémoire" des victimes — les efficaces services de protection des citoyens des Etats-Unis ne s'en sont jamais pris, eux, à leur "mémoire", mais seulement à leur vie, biologique et privée !

Il en est ainsi systématiquement dans l'histoire : toujours, les progressistes alignent des faits, les criminels réactionnaires alignent des mots et agitent des fanions de religion ou de patriotardismes  : l'irréalisme a bien des alliés.
Jusqu'où iront les uns et les autres ? Puisque l'année s'y prête, souvenons-nous encore de JFK, et de l'effarement du meurtre d'Oswald devant les caméras du monde entier, sous les yeux de soixante-dix (70) policiers inertes. Quel diable de rapport cela pourrait-il avoir avec des agités qui osent à présent jeter l'opprobre sur des gouvernants innocents (pléonasme) à propos de Sean Hoare, David Kelly, Gary Webb et tant d'autres — cf. Internet SVP — ? Apparaîtrait-il, dans ce monde où mafias et maffinance sont si séparées, qu'il existerait des gens dont la vie et le travail ont gêné, gênent et gêneront les dirigeants en place et leurs dévoués flics ? Que nenni : si une commission réellement indépendante faisait une étude statistique des morts violentes chez les calomniateurs de nos saints media, elle prouverait que l'"espérance" (au sens mathématique) de disparition prématurée des journalistes hors norme est... ce que chacun peut savoir. Mais qui fera cette étude ?  Personne : ce n'est ni rentable ni compétitif.
D'ailleurs, en ces affaires d'espérance de vie, il y a des compensations. Parmi ceux qui sont des modèles d'inoxydable pureté, on vit longtemps, politiquement et biologiquement : voyez, entre mille, la riche biographie de Giulio Andreotti (ce "divo" hélas c'est fini), Henry Kissinger (plus de 90 ans aujourd'hui), Licio Gelli (idem), tant d'autres ! Même Richard Cheney, quoique grand cardiaque depuis longtemps, se maintient bien aussi : dieu reconnaîtra toujours les siens, ô saints inquisiteurs...

Laissons cette trop cruelle ironie, et d'abord nuançons. Lorsque des sites comme <conspiracywatch>, ou des périodiques comme notre menterie de référence, "le Monde", affirment quelque chose, c'est une information — non TOUJOURS exempte de désinformation, mais quoi ? C'est bien normal, de la norme actuelle : certains media disposent de ressources financières suffisantes pour se faire voir et entendre, soit à partir des écoles dites de journalisme, soit par les procédés de recherche des grands moteurs d'Internet, et TOUT ce qu'ils présentent comme vrai n'est pas faux. Mieux encore, À TRÈS LONG TERME ils finissent en général par publier en entrefilets même des vérités susceptibles de choquer leur lectorat, pourtant largement résolu à entendre seulement ce qui ne trouble pas son confort bourgeois. Ils ne maintiennent d'incroyables mensonges que sur des sujets vraiment graves. Le cas Kennedy en est un, jusqu'à ces derniers temps — faudra voir, d'ici le cinquantenaire du 22 novembre 1963.
Ceci posé, il est un peu énormément facile de se tenir pour informé en s'arrêtant tous les jours au matraquage des media de la finance, et de s'éveiller à quelque méfiance seulement à propos des "informations d'Internet" (comme si Internet en bloc était une source unique) : or c'est ce matraquage qui fonctionne en masse, qui exploite et exalte l'instinct grégaire.
Quand on cherche à lutter là-contre, on ne serait pas obligé de fouiller parfois jusqu'à des poubelles si nos décharges publiques de désinformation mentaient moins souvent. En tout, c'est affreux mais c'est : les tenants de la vérité courent plus de risques que jamais, tandis les menteurs n'ont jamais été doués de tant de possibilités et les paresseux d'autant de prétextes — la détermination des uns croissant avec la bassesse des autres — ; finalement, la trop fameuse opinion publique vit actuellement dans un négationnisme complet de la réalité.

Plus large. Depuis l'été, on peut voir en salle ou sur écran personnel le film "Diaz, un crime d'Etat", décrivant quelques aspects des manifestations de jeunes et des crimes de propagande et police, autour du "G8" de Gênes en juin-juillet 2001 (quelque deux mois avant les massacres du WTC). Il faut ici songer à ce que représentent de telles images : est-ce finalement favorable à la vérité et à la prise de conscience, ou  à force d'écœurement devant tant d'horreurs cela tend-il à renvoyer des masses de gens à la peur, à la honte et finalement à l'inertie ?
C'est une part de grandes questions : à propos des manifs en général, que penser de leur bilan ? Qu'on se souvienne par exemple de celles qui s'opposèrent voici trois ans à l'assassinat des retraites en France : on voit maintenant le sieur z'Ayrault faire passer en 2013, dans un large silence syndical, ce que la droite reconnue n'a pas osé en 2010... Plus précisément, qu'on se remémore le défaitisme entretenu en échos dans les défilés voici trois ans : bien peu semblaient y croire à une victoire de quelque justice. Alors, de telles démonstrations sont-elles encore ce qu'elles devraient être — des moments d'entretien d'une combativité — ou sont-elles devenues tout le contraire ?
Il n'y a pas de réponse simple ; mais il est clair qu'à force de détermination dans la barbarie (la désinformation et en général la décérébration en sont une part, considérable), les suragressifs aujourd'hui en place ont largement assommé les citoyens des pays encore un peu riches. De l'autre côté, chez les pauvres, l'urgence de simple survie est telle que la place laissée à l'indispensable réflexion critique n'est guère plus grande. En tout, on aboutit à cette incroyable situation : tandis que le pouvoir s'étale de plus en plus clairement dans ses références à la violence, voire au sadisme, tandis qu'il va compulsivement toujours plus loin dans la torture, la guerre, les massacres, dans l'intoxication systématisée et raffinée par menterie pure ou hypocrisie explosée, en face de lui demeurent difficilement de rares dénonciations nettes, diffamées en "conspirationnisme". En pseudo-réponse au déchaînement de brutalité matérielle, politique, du système, partout on voit de fausses analyses arrêtées à l'économaniaque et aux panonceaux honteux de la non-violence, partout de ces faux humanistes horrifiés de malheureuses séquestrations de quelques cadres très supérieurs !

Ainsi on laisse partout noyer l'évidence, y compris par des faux-fuyants sur le thème que "cela ne nous dit pas quoi faire" : parbleu ! sans doute n'y a-t-il aucun exemple, dans l'histoire, de réplique aux coups bas répétitifs des êtres les plus violents — ni aucune leçon actuelle à en tirer...

dimanche 29 septembre 2013

Actuel 54 Frémissements ?


La perspective de frappes aériennes sur la Syrie s'éloigne pour le moment. On sait que, même "chirurgicales" (vocabulaire OTAN-CIA), de telles frappes provoquent des "dommages collatéraux" (idem) : si alors on concrétise en humaniste ce que cela veut dire, on peut comprendre un certain soulagement actuel à voir repoussée la guerre impériale ouverte. Mieux encore et à propos de la même région du monde, il paraît que les barbares impérialistes des Etats-Unis vont rencontrer les barbares intégristes iraniens, alors que jusqu'ici les uns s'opposaient très farouchement aux autres : autre danger de confrontation militaire diminué.
Toutefois à vrai dire, il reste des problèmes : en Iran en particulier, on ne voit pas pourquoi les dictateurs de l'espèce ayatollah seraient moins corruptibles et moins manœuvrables que tant d'autres, en Arabie Saoudite, au Qatar, en Egypte et ailleurs — après tout, ce sont des religieux comme les autres, et s'ils peuvent s'engraisser et perpétuer leur pouvoir en laissant crever leur peuple on comprend qu'ils soient ouverts à la négociation avec le grand Satan d'hier. Mais dans de telles conditions, on a la paix entre les puissants dans la guerre universelle contre les pauvres, et ce n'est pas le plus sage garant de la stabilité du monde.
C'est de quoi songer sur les apaisements provisoires. Songeons.

Voici trois quarts de siècle (comme le temps, sinon certaines attitudes, passe), une célèbre rencontre avait lieu, à Munich, entre Monsieur le Chancelier Hitler, le Premier britannique Chamberlain et le Premier français Daladier. Ce fut pour avaliser le démembrement de la Tchécoslovaquie, en attendant mieux, par les nazis. A son retour Daladier, acclamé à Paris par une foule en délire de pacifistes et autres non-violents, marmonnait sinistrement : "les cons !" De son côté à Londres, Chamberlain attendait un peu ; puis, le bon Adolf laissant, sans broncher, déchirer encore un peu la Tchécoslovaquie par les gouvernants de Hongrie et de Pologne, il en remettait que "Monsieur Hitler est un gentleman".
Cependant il y avait aussi Churchill — et d'autres, en France notamment, sans attendre de Gaulle ; mais écoutons juste Churchill, parce que son mot est bien frappé et qu'il le dit tout de suite, en 1938 :
"You were given the choice between war and dishonour.
You chose dishonour
and you will have war."
("On vous a donné le choix entre la guerre et le déshonneur.
Vous avez choisi le déshonneur
et vous aurez la guerre.")

On n'oublie pas ici que Churchill était l'homme de la répression féroce contre l'Irlande comme contre l'Inde, et le décideur des "lois sadiques" entretenant la déflation dans la misère noire des ouvriers anglais ; on n'oublie pas que c'était aussi le tigre avertissant que tout soutien à la République espagnole serait motif de condamnation et rétorsion britanniques (cher Río Tinto, chère Peñarroya, chers intérêts miniers capitalistes anglais en Espagne, chers soutiens en armes vendues à bas prix à Franco) — curieusement toutefois, ce ne sont pas toujours ces motifs qui sont invoqués contre Churchill... —
Mais bref, brute ou pas, Churchill était tout sauf un aveugle ou un lâche. C'est cela qui fait l'utilité de le méditer contre les non-violents et pacifistes d'aujourd'hui.

Il ne s'agit pas d'amalgamer des situations très différentes. Il s'agit de repérer ce qu'il y a de commun entre la montée du nazisme dans les années 1930 et celle des maffinanciers depuis un grand demi-siècle : la folie de pouvoir et le nombre de victimes innocentes, par millions. Cependant, aussitôt qu'on a le malheur de rendre trop claires les similitudes de sauvagerie totalitaire entre le déchaînement des pires pouvoirs dans les années 1930, et un système qui invertit les plus puissants moyens techniques de l'histoire de façon à susciter le chômage, la guerre et la pauvreté dans la dévastation générale de la planète, il y aura toujours dans l'assistance un orateur pour faire un cours sur la pente facile à traiter de nazi un pouvoir-violence quelconque.
Eh bien soit, l'En-pire anglo-saxon n'est pas nazi. On y a trop bien compris les vertus et leçons de l'hypocrisie chrétienne et spécialement catholique : on sait toujours se référer, pareillement, à des valeurs suprêmes strictement contraires à l'inquisition et aux crimes qu'on ne cesse de pratiquer. Les nazis étaient bêtes. Obama après Bush, Cameron après Blair (et Hollande-Valls après Sarkozy) font beaucoup mieux.
En outre, il y a une autre différence entre la prévision de guerre de Churchill en 1938 et la situation d'automne 2013 : c'est que, par attentats et invasions, par flicages et par tortures, en Syrie gangrenée par les commandos venus d'Israël ou de Turquie, en Libye sanglante et réduite au chaos, en Irak ramené à l'âge de pierre, en Afghanistan, dans toutes les bases de l'OTAN, dans tous les Guantánamo d'Afrique, d'Amérique du Sud et du reste du monde, dans toutes les usines délocalisées puis remontées là où les salaires sont une honte, dans tous les serveurs auxquels sont connectés tous les ordinateurs, de par la NSA, la CIA et les autres, LA GUERRE EST DÉJÀ LÀ, visible, tangible, partout...

... sauf, pour le moment, là où les hypocrites, les non-violents, les pacifistes et d'autres traîtres, aveugles ou lâches la voilent de leur mieux.

samedi 31 août 2013

Actuel 53 Syrie, vite


Il y a des moments politiques où la dégueulasserie est clairement à la fois, chez les plus puissants, la preuve de leur psychose de pouvoir et, chez leurs adjudants, l'inévitable obédience à cette abjection. De même qu'on remarque un peu partout le rôle de traître "socialiste" achevé de Manuel Valls, Monsieur Flic "Mieux-que-la-droite", de même à l'envers de toute honnêteté le président actuel de la République française est en train de faire "mieux" que ce qu'avait fait Anthony Blair au Royaume-Uni : dans l'horreur contre l'Irak en 2003, Blair avait suivi Bush avec d'autres, dans l'horreur contre la Syrie en 2013 Hollande ose suivre Obama tout seul. Les intérêts évidents à court et long terme de la France dans le monde arabe et le monde tout court sont sacrifiés à une veulerie d'"atlantisme", de soumission au gouvernement des Etats-Unis au moment même où celui-ci est isolé jusqu'au ridicule dans sa barbarie, ses mensonges et ses erreurs.
Cependant on pointe en cette fin août, ici ou là, que l'intervention militaire US se précipite peut-être parce que les inspecteurs des Nations-Unies risquent d'apporter la preuve que les allégations des propagandes atlantistes sont absurdes ; ou bien on proteste que les frappes seront limitées (quitte à déclarer ensuite une fois la guerre enclenchée que c'est "parce que ces salauds de Syriens ont osé répliquer")... Bref : tout et n'importe quoi pour s'accrocher à la supposition qu'il y a quelque part, dans le jeu de sauvagerie du pouvoir, des embryons de rationalité partielle.
            C'est précisément ce qu'il faut écarter. Plus clair encore que par le passé, dans les actes de cette guerre coloniale, c'est son caractère compulsif de psychose et perversion qu'il faut saisir et dénoncer. Son déclenchement est inévitable PARCE QUE les "neocons", les bellicistes qui pourrissent de plus en plus complètement le jeu démocratique aux Etats-Unis et dans le monde, sont INCAPABLES de s'arrêter dans leur folie hitlérienne. Il faut oser voir que la guerre en Syrie a toutes les chances d'avoir lieu JUSTEMENT en tant qu'insensée : parce que ceux qui y poussent sans plus savoir pourquoi sont devenus fous, et parce que ceux qu'ils ont poussés au pouvoir n'envisagent plus de leur être "infidèles".

jeudi 15 août 2013

Actuel 52 Egypte, août 2013


Il faut de grandes précautions pour parler de l'horreur historique.
Lorsqu'on entend Obama ou Kerry, la question n'est jamais ce qu'ils déclarent, mais ce qu'ils cherchent à faire croire ou le clan qu'ils cherchent à pousser. Ils disposent, eux, d'informations rares sur les crimes qu'ils commettent et les peuples qu'ils écrasent. Ils savent quelle proportion de gens ont oublié, ici et là, l'appel téléphonique du président de Washington à Morsi pour le pousser vers la sortie, provisoire ou non. Ils ont les réflexes exercés à penser dans l'ensemble du monde et d'abord évidemment, dans le cas de l'Egypte, à la Tunisie, à la Libye, à la Syrie et à l'Iran — sans parler du Mali, du Nigeria comme de la Côte-d'Ivoire —. Ils viennent de changer le patron des pétrodollars du Qatar, et ils savent précisément sur quoi ils peuvent compter de ce côté des féodaux. Ils sont clairement au courant des dangers nationaux courus par le dictateur Erdogan à l'intérieur même de la Turquie. En tout, ils peuvent peser mieux que quiconque les effets de leurs corruptions et de leurs meurtres, localement et globalement, surtout dans une part de Terre où ils manœuvrent, en bonne compagnie de Londres, depuis largement un demi siècle.
C'est pour tout cela que les affirmations du Réseau Voltaire (qui ont leur base de réalité) ou les bonnes données de globalresearch.ca (spécialement l'article paru ce 15 août sous la signature d'Eric Walberg) sont insuffisantes et, en ce moment surtout, critiquables par leur côté simplificateur et parfois naïvement partisan au nom d'une vraie générosité.

Ceci posé, il y a des choses claires. Les "Frères-Musulmans" sont des assassins, en particulier en Tunisie. Désormais leurs prêcheurs peuvent et vont étaler les victimes des massacres en Egypte comme "leurs" martyres. Ce ne sera pas la seule occasion où des criminels se posent ainsi, et l'Eglise catholique n'a là-dessus de leçons à recevoir de personne : les bâtiments coptes incendiés autour du Caire vont redonner à ses jérémiades un nouvel élan dans l'actualité. La colère ou la nausée devant des vies cruellement éteintes sont un bon terreau à cultiver pour fanatiser et tromper plus avant les malheureux : de toutes parts, surtout religieuses, les partisans d'inquisitions vont se déchaîner, et de toutes façons les balles des répressions vont contribuer à étouffer la voix qui fut voici peu de temps encore celle des "émeutes de la faim" — contre les éternels "ajustements structurels" imposés par le FMI en Egypte comme ailleurs, en Egypte plus qu'ailleurs —. L'essentiel pour la cause humaine, qui ne saurait connaître plus de frontières que les géopoliticiens anglo-saxons, est de rappeler à tous les peuples que leurs ennemis les plus proches sont certes les plus immédiatement terribles, mais que ceux qui les manœuvrent sont à combattre plus constamment encore. Au contraire, ceux qui s'en prennent à leurs frères en foule au lieu d'attaquer les ambassades de Washington et de Londres servent à la fois les prêcheurs de l'arriérisme, les mafieux locaux et leurs commanditaires de la City et de Wall Street. Il ne faut pas que les morts du Caire soient une bénédiction supplémentaire pour CIA et MI6. Il ne faut pas qu'ils permettent d'oblitérer les meurtres de Belaïd et de Brahmi. Il ne faut pas qu'ils soient utilisés pour élever une nouvelle muraille plus particulièrement autour des femmes et des enfants de pays isolés des chances de mieux-être.

                        Il faut beaucoup répéter cela, en beaucoup de lieux, si on veut éviter un surplus d'excès d'abus de brigandages et gaspillages monstrueux.

lundi 29 juillet 2013

Actuel 51 Mohamed Brahmi


Tristesse, d'abord.
Jeudi dernier, anniversaire de la République tunisienne, Mohamed Brahmi a été abattu. Les balles ou rafales ont été tirées sans doute depuis l'arme déjà utilisée pour le meurtre de Chokri Belaïd, et la veuve de celui-ci a fait entendre sa voix parmi les toutes premières élevées contre ce nouveau crime : la mort et les assassins ont rapproché ceux que la vie et les complexités politiques n'avaient pas réussi jusqu'ici à unir assez fermement.

Cependant il faut voir au delà des fantoches, décérébrés par les obscurantismes, que vont brandir les media.
En 1962, la Ligue Islamique Mondiale était fondée contre le populaire Nasser par le féodal et féal US Fayçal, avec l'aide non seulement des pétroliers "arabes-américains" (Ar-Am-Co) mais directement de la CIA et de la longue expérience de manipulation britannique des fanatismes musulmans. C'est de ce moment que date la montée en flèche des nombres de mosquées et médersas. C'est de là qu'il faut situer le déchaînement, du Nigeria à l'Indonésie, de la lutte entre les traîtres compradores de théocraties et les patriotes démocrates, conscients que des traditions locales figées ne peuvent être compatibles avec la réouverture de leur monde à la planète et à l'histoire. Il est significatif par exemple que, dans l'Algérie voisine, des inquisiteurs ultra-réactionnaires comme Belhadj refusent désormais de parler français pour mieux apprendre... l'anglais — langue favorite aussi de Rached Ghannouchi, grand commis voyageur de Londres et Washington et agent des commanditaires réels des meurtres de Tunisie.
C'est donc à long terme une bonne chose que, dans les régions encore écrasées par l'héritage des diverses pesanteurs impériales mahométanes (souvent fort concurrentes : arabes, turques, persanes, ...), on apprenne à voir d'un côté les cheikhs et autres délégués plus ou moins consentants et vicieux de l'Empire actuel, et de l'autre côté les chances de progrès et de libération. Il sera de plus en plus facile, au Maghreb et ailleurs, de faire le tri entre les acharnés de privilèges indécents abusant d'aveuglements appelés foi, et ceux qui veulent émanciper les citoyens, dont les femmes, donc les âmes.
            Contre l'alliance des réactions arabes et anglo-saxonnes, intrication convulsive d'araignées et de scorpions, ce sont des peuples entiers qui pénètrent les chemins de leur retour à la grandeur.

mercredi 17 juillet 2013

Actuel 50 Retraites : plan de vol


Sommet d'été, saison des coups bas : c'est le moment où les pouvoirs, notamment en France, font passer les mesures les plus oppressives en comptant sur l'inertie étalée aux plages. Cette année en plein quatorze juillet, le démarrage s'est fait avec les déclarations télévisées de Monsieur le Président de la République. Il était soutenu par les fins peignés Chazal et Delahousse, dans une mise en scène classique : continuité de demi-sourires pincés de fausse intelligence, fausses interruptions programmées sur le thème de fausses questions tout enrobées d'experts zéro virgule quelle audace de faire semblant de couper la parole à Monsieur le président si c'est pas ça la démocrassie !

M'enfin il a été question entre autres des retraites. Le président a fait un beau schéma en trois points : 1) bien sûr qu'on va allonger "la durée des cotisations" ; 2) il y a un "déficit" de vingt milliards ; 3) on pensera tendrement à ceux qui ont commencé à travailler à quinze ans (cas peu fréquent aujourd'hui, le chômage des jeunes accumule des records depuis longtemps), aux métiers pénibles et aux femmes.
Reprenons.

1) De mauvais citoyens comparent les promesses électorales de Monsieur Hollande à sa politique. Qu'êtes-vous prêts à parier que la promesse d'allongement des cotisations sera, elle, tenue ? Le prétexte donné pour ce vol supplémentaire est celui-là même que Monsieur Seillière, ex-chef et rénovateur du Medef, avait mis en avant : c'est l'allongement MOYEN de la durée de vie. C'est aussi complètement objectif, impartial et indépendant que le journal-de-référence du pouvoir. Toutefois il y a des gens qui ont un peu réfléchi aux lissages d'injustices permis par les MOYENNES et autres biais dits statistiques — "l'indice des prix" en est un exemple fameux —. Eh bien, même si on admet les chiffres officiels en France, l'espérance de vie des ouvriers s'arrête à soixante-quatorze ans, celle des mieux lotis à quatre-vingt-deux : partant du repère à soixante ans, faire cotiser les ouvriers jusqu'à soixante-sept comme le demandait récemment Madame Parisot, c'est leur voler la MOITIÉ de leur temps de retraite. En réalité, pour ceux qui s'informent, la réalité sera d'une injustice encore plus criante :
– un actionnaire, un parasite, s'est contenté de "placer" son fric d'après les conseils de son réseau social ; il est totalement incapable de comprendre, ne parlons pas d'inventer, les robots de mise au chômage dont il est propriétaire de par la loi ; celui-là peut abuser longtemps du droit de vivre : il a les moyens de médecine pour cela ;
– un ouvrier a créé la richesse réelle tout au long de sa vie ; il est assez endurci pour attendre longtemps, le moment venu, les soins avares à sa vieillesse, dans des hôpitaux réduits et encombrés...
Vive la Cinquième !
Mais au fait, en rêvant très fort, ne peut-on songer à des moyens de réorienter l'activité, ou d'abréger la retraite, de Monsieur Seillière et de Madame Parisot ?

2) Vingt milliards de "déficit" des caisses, ce n'est pas rien. Mais qui sait, de science sûre, comment on calcule ce nombre impressionnant ? qui domine les astuces chiffrées par lesquelles les banques, spécialisées dans toutes les tricheries comptables, exhibent des bilans toujours en faveur des sangsues ? Avec l'instruction telle qu'elle est distribuée, entre autres les notions claires dans tous les esprits d'intérêt du capital et surtout de dettes, quel pourcentage de citoyens voit net dans ce niveau de brigandage légalisé ? En tout cas ce ne sera pas grâce aux "sciences économiques et sociales" de lycée...
Démocrassie, j'écris ton nom !

3) Restent les apprentis jetés hors scolarité dès quatorze ans (s'ils ont trouvé du travail légal ensuite pour "cotiser"), les mineurs de fond (s'ils n'ont pas chopé la silicose ou équivalent), et les femmes (si elles ont survécu au cumul des ménages et du travail au noir ou au-dessous du SMIC) ; pour tous ceux-là, on signera un "accord" entre "partenaires sociaux".

                        Avec la CFDT ?

samedi 6 juillet 2013

Actuel 49 Sites et autres, mi-2013


La recherche de la vérité n'a jamais été simple. Elle est de plus en plus difficile dans la jungle imposée aujourd'hui, où surabondent des textes signés par ceux qui acceptent de trahir et trouvent ainsi les moyens de diffuser largement. On propose ici, sur des évènements qui comptent, de méditer deux exemples : l'un, très ponctuel, présente un schéma de dévoiement qui se reproduit fréquemment ; l'autre, plus étendu, invite à se confronter à des sources qui valent à la fois d'être signalées et d'être accompagnées d'expresses mises en garde.

On a accès sur la Toile à une vidéo montrant l'effondrement, le 11 septembre 2001, de la fameuse tour 7 du World Trade Center — l'un des immeubles sur lesquels le rapport de la Commission "d'enquête" est en somme muet, et c'est déjà beaucoup dire —. L'essentiel de la vidéo est que la grosse trentaine d'étages s'effondre de façon très verticale sur ses fondations, tandis que tous les étages visibles conservent une façade intacte. Cela vaut la peine d'examiner ce qu'en conte le site <conspiracywatch> : il se contente d'appuyer lourdement sur le fait que l'autre côté de la tour est caché par des fumées et en "déduit" qu'un incendie suffit à expliquer l'effondrement.
Or 1) il n'y a pas d'exemple de construction moderne à armature d'acier où un incendie ait provoqué une telle destruction, 2) si de graves dommages avaient lieu d'un seul côté, la chute du haut de l'immeuble serait dissymétrique, 3) telle qu'on voit la tour "couler" verticalement sur ses fondations, il faut de toute nécessité que celles-ci, et non de hauts étages, aient été les premières détruites, 4) des enregistrements sismiques confirment des séries d'explosions avant la chute, 5) on a montré la vidéo en cause à un expert en démolitions programmées (devenues communes, par exemple en France pour d'anciens HLM), qui a immédiatement diagnostiqué une action par explosifs ; l'expert en question, Danny Jowenko, est mort dans un accident d'automobile accidentel.

Second registre.
Les éditions Demi-Lune publient, aussi autour de ce qui s'est passé le 11/9/01, Webster G. Tarpley et Peter Dale Scott. Il y a beaucoup à tirer de la lecture de ces auteurs, et de leurs références (quand ils les fournissent, ce qui est incomparablement plus fréquent chez Scott que chez Tarpley). Leur distance aux orthodoxies officielles procède d'attitudes très différentes :
–Tarpley est ami de LaRouche (sorte de Soral US : cf. Actuel 48) ; il mène et mêle curieusement des attaques groupées (parfois invérifiables) contre les thèses gouvernementales, et contre Chomsky et Michael Moore, traités de "cerbères de la gauche" ;
– Scott est ami de bons moines ; toute occasion lui est bonne pour maintenir quoi qu'il advienne des positions de scepticisme et non-violence à la Gandhi, ce que ses cumuls de données et de confusions facilitent grandement.
Que faire d'autre, que citer des travaux aussi importants et stimulants, en recommandant toutefois au lecteur :
– surtout de ne pas renoncer à s'informer
– ensuite de poursuivre ses expériences, en s'appuyant sur toute sa raison avant de croire (un peu) qui que ce soit ?

Pour finir aujourd'hui sur ce terrible sujet des sources : la page d'accueil du présent blog offre des liens ; on répète ici que se référer à un texte ou un site suppose simplement qu'il y a quelque intérêt à cela, soit parce qu'on y trouve des arguments, soit parce que c'est un repoussoir utile, soit pour d'autres raisons d'intérêt général — en aucun cas parce que l'auteur est pris pour une idole ou un saint —. Comme on l'a exprimé dès le départ (Actuel 1), à certaines conditions on doit pouvoir se servir même de discours de dame Le Pen et de bien d'autres : le fond demeure de toujours croiser des sources diverses, faire se répliquer des propagandes. Car les tricheurs des diverses manipulations savent le danger des mensonges unicolores : si on cherche par exemple à sortir des matraquages made in USA, il est souvent difficile de trouver autre chose que des gens soutenus d'une manière ou d'une autre par des pouvoirs rivaux, russes, chinois...
... ou français.

lundi 10 juin 2013

Actuel 48 De Tautin à Méric en perspective


Mercredi 5 juin 2013, Clément Méric a été assassiné à Paris par les cryptonazis des soi-disant JNR, Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires. Il s'agit d'une mouvance où reviennent avec insistance les noms de Serge Ayoub, nervi chef, et Alain Soral, professionnel du délire orienté.

Il faut pour le moment laisser à l'histoire à venir la question de savoir ce que les pouvoirs de police envisageaient, et ont effectivement cherché à faire, contre l'affrontement prévisible et prévu qui a permis le crime. En tout cas le secret n'a pas pu être gardé sur le mort.
Il n'en est pas toujours ainsi. Les meurtres aujourd'hui connus autour de mai 68 avaient probablement commencé avec Philippe Mathérion — grenade offensive, le 25/5/68 — : le silence fut longtemps efficace, et il fallut par exemple des décennies pour que le journal objectif impartial indépendant de référence etc., bref "le Monde", dévoile l'horreur.
A ce qu'on peut aujourd'hui connaître, il y eut ensuite la charge des CRS sur la route de Flins, où allait une délégation de soutien aux ouvriers de Renault en grève. Le détail importe sans doute moins que quelques souvenirs : des moissons encore debout, une incroyable impression de dénuement de tout jeunes gens devant des brutes organisées, armées, cuirassées, bottées ; une terrible bousculade, le corps de Gilles Tautin tombe à la Seine, il est mort — 10/6/68 —. Des condisciples, des cœurs fraternels transformeront ses obsèques en pluie de roses rouges.
Sauf erreur, c'est le lendemain 11 juin que les balles ou grenades des CRS tuaient Pierre Beylot et Henri Blanchet, ouvriers à Peugeot-Montbéliard : les usines Peugeot de la région furent l'un des bancs d'essai de la CFT, Confédération Française du Travail, groupe de sbires assassins au service du patronat que des gens comme Papon, Pasqua et Giscard choyèrent aussi longtemps qu'ils purent.
Mais pas indéfiniment. Reims, VMC (Verreries Mécaniques Champenoises), nuit du 4 au 5 juin 1977. Dix-sept balles au moins — tirées par un petit commando de la CFT sans doute venu d'une usine Citroën et télécommandé depuis le quai de Javel à Paris — abattaient trois ouvriers : Serge Vermeulen et Raymond Richard étaient gravement blessés, Pierre Maître atteint à la tête mourait. La réaction populaire, de nouveau énorme, sonnait le glas de la CFT.
Il faut donc d'abord redire : c'est à partir de crimes organisés, de ce genre ou d'autres plus énormes et guerriers, que se maintient le régime capitaliste. Dans le langage de ses "historiens", ce maintien devient motif d'émerveillement pour ses "capacités d'adaptation" et Monsieur Alain Minc, aussi du beau "Monde", ne manque pas de chanter en pleine crise sa "résilience" et sa "plasticité"...

Ainsi, la trahison de toute vérité par le pouvoir en place atteint un niveau de dévergondage et de raffinement jusqu'ici inconnu, et il n'est pas simple de lire des éléments sûrs quelques jours à peine après le début de l'affaire Méric. Ses agresseurs étaient certainement actifs dans les JNR ; des sources policières et un témoin ont mentionné un poing américain, non seulement dans les mains d'un des agresseurs, mais précisément comme arme du meurtre : le compte rendu actuel d'autopsie refuse à la fois de le confirmer et de l'écarter — seuls de mauvais esprits en déduiraient qu'il refuse tout simplement d'informer. Quant à l’institution judiciaire, les comptes rendus donnés par la presse financière hésitent entre homicide volontaire et coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner : faut-il s’attendre à une inculpation d’homicide volontaire sans intention de donner la mort ?
On a donc déjà affaire à des errements et dissimulations sous prétexte de sûreté et de sérénité, on va en voir bien davantage : c’est qu’il y a embarras au moins partiel du pouvoir devant un crime qu'il veut exploiter, qu'il l'ait favorisé ou non. Contre le pouvoir, pour l'honnêteté, le recours immédiat en pareilles circonstances est l'histoire passée : dans des cas, hélas sans nombre, où une police très fermement dirigée contre les démocrates, les pauvres et les progressistes, monopolise l'accès direct aux faits et documents bien établis, comment lire les communiqués et témoignages ?
Il n'y a pas une grille de lecture unique et simple : les officiels le savent, en usent et en abusent. On va donc simplement proposer ici l'examen d'une situation "analogue", en ce sens que les financiers de l'époque cultivaient pareillement des forces d'extrême droite particulièrement violentes, tandis que la division ravageait les progressistes — égarés par des faiblesses réformistes d'un côté, des sectarismes vite totalitaires de l'autre —.

Dans les années 1930, les échos du fascisme puis du nazisme résonnaient de plus en plus fort chez les "industriels" français, fascinés par les Thyssen et les dons de dizaines de milliers de marks-or à Hitler avec le succès qu'on sait. Bien malgré eux, il y avait en face un suffrage universel moins soumis aux media de la finance qu'aujourd'hui ; mais il n'en était pas moins perverti par l'ignorance politique notamment de masses petites-bourgeoises et paysannes, aussi bien avec les souvenirs du patriotardisme de 14-18 que par les "chemises vertes" des droitistes agricoles (la France était encore largement rurale). Ce qu'était dans cette ambiance la pesanteur des violences fascisantes n'a pas d'équivalent net aujourd'hui — entre autres parce que la solidarité et le sens commun ouvriers ne sont absolument plus présents dans de semblables proportions —. Mais les traits d'exploitation du mécontentement populaire par ceux mêmes qui le créaient, la détermination dans la fausseté des brigands d'argent, et la timidité de ceux qui auraient dû mener une véritable opposition, sont en 2013 assez ressemblants. C'est pour cela que l'agression la plus nette contre Léon Blum, et les comptes rendus qu'en fit la droite, ont leur intérêt. On se doute que Léon Blum n'est pas considéré ici comme un modèle de résolution antiréactionnaire : justement, l'hystérie des agresseurs en est d'autant plus éclairante.

Jeudi 13 février 1936 en fin de matinée, Léon Blum quittait le Palais-Bourbon pour se faire raccompagner chez lui dans la Citroën de son collègue député Georges Monnet, et de Madame Monnet. Malgré les informations déjà diffusées dans la presse du jour, la voiture passée par la rue de l'Université arrive étourdiment boulevard Saint-Germain, en pleine foule réunie devant le domicile de Jacques Bainville qui vient de mourir — Bainville, l'un des principaux responsables de "l'Action Française", avec Maurras et Massis, sans oublier le sinistre Léon Daudet —. Il y a là tout ce qu'on peut penser de "Camelots du Roy" et autres Croix-de-Feu. Or depuis des années, Blum est l'objet de la part de Maurras des mêmes vociférations et hurlements au meurtre qui lui avaient déjà servi pour préparer l'assassinat de Jaurès — les lois contre l'incitation au crime n'existent pas pour ces hyènes —.
La voiture de Monnet est coincée, et elle porte un macaron de député qui en l'occurrence ne risque pas de lui être favorable. Les paramilitaires n'attendaient pas pareille aubaine, ils veulent savoir qui leur est échu, ils se referment sur le véhicule, ils reconnaissent Blum. C'est le déchaînement : arraché à son siège, il commence à être lynché sur place, deux agents tentent d'intervenir mais sont submergés — le directeur de la police municipale Guichard, très connu pour son droitisme, fera attendre plus d'une demi-heure la voiture qui emmènera le blessé à l'Hôtel-Dieu —. Ce sont des ouvriers travaillant sur un chantier proche, au Ministère de la Guerre, qui sauvent la vie de Blum, roué encore de coups de pied alors qu'il gisait à terre ensanglanté.

Il y a déjà une certaine forme d'audace dans la "libération" (de quels instincts ?) à s'acharner ainsi sur un homme de soixante-quatre ans : ce qui était bien plus vieux en 1936 qu'aujourd'hui. Mais Maurras ne pouvait être en reste sur ses troupes.
Il y eut donc d'abord le compte rendu de l'évènement dans "l'Action Française", bon guide déjà pour saisir dans le principe (sinon dans l'orientation précise) ce qui nous attend et ce qui se fait déjà de la part de notre droite, à propos de Clément Méric. D'après les termes du journal de ces super-patriotes ensuite à genoux devant la "divine surprise" de Pétain et de la Kollaboration, un "chauffard cossu" aurait fait se ruer dans la foule une "magnifique automobile", "ne s'arrêtant pas au respect de la mort [...] On regarda alors et on reconnut Léon Blum [...] Aussitôt ce fut dans la foule, déjà montée contre l'insolent, un cri unanime de colère. Les vitres de la voiture volèrent en éclats. Un mauvais parti aurait été fait au chef socialiste si, à ce moment, les ligueurs et camelots du roy présents ne s'étaient pas interposés"… !
Comme le poing américain s'est interposé entre le JNR et Clément Méric ?
"Le Canard enchaîné" titrait déjà quelques jours plus tard : "L'odieux attentat de M. Léon Blum contre M. Charles Maurras a piteusement échoué". Mais le lecteur a largement saisi le procédé d'inversion mentale systématique à la base de la fausseté droitière : respecter un Bainville surtout mort mais jamais un Blum surtout vivant ; faire d'un véhicule, coincé par une manifestation privée envahissant la rue, une  magnifique automobile agressive, et se poser par là en défenseur de la volonté populaire alors qu'on défend les pieuvres réactionnaires ; renverser contre toute évidence la barbarie, incitée et mûrie de longue date, en réplique spontanée à une provocation...
Il y eut "dissolution" — provisoire et en valse-hésitation — de "l'Action Française" (et des Camelots) : mais le journal continua très librement sa parution ! Puis, lors de la perquisition chez Maurras (pratiquement sans suite), les policiers trouvèrent des pièces de monnaie gagnées par la "vente des verres du baron Blum"… Il y eut mieux ensuite.

En riposte à l'agression, le dimanche 16 février — jour où triomphait aux élections espagnoles le Frente Popular — pendant des heures, des centaines de milliers de manifestants regroupés déjà en "Front popu" inondent Paris du Panthéon à la Bastille et à la Nation.
C'est là que Maurras se sublime : devant ce "Nombre", il décrit "l'Asie barbare", les "échappés de prison et gibiers de bagne" — visant sans doute les foules ouvrières et populaires derrière Roger Salengro, Léo Lagrange, Victor Basch, les amis radicaux de Pierre Mendès-France, les communistes —, une "pègre étale", gens "venus de Russie, du Levant presque sauvage, dans lequel l'élément juif-métèque n'a pas de mal à dominer".
Et ce salaud raciste et nazillon pleurnichera d'être protégé dans une prison quelques mois après la Libération, n'ayant jamais cessé de se considérer comme un héros français.

Or on a fait beaucoup d'avancées (non pas progrès) dans la propagande ultra-réactionnaire depuis Maurras.
On a pu ainsi entendre ces jours-ci Monsieur Jean-François Copé se précipiter pour demander, puisqu'il est question de "dissoudre" des groupuscules d'extrême droite, qu'on s'en prenne aux groupuscules d'extrême gauche. Ce goût de l'asymétrie a un sens clair au vu de l'expérience historique, en mai 68 et depuis, avec une constance sans égale : pour faire plaisir à Monsieur Copé, il faudrait dissoudre et laisser changer poliment de nom les cryptonazis, mais perquisitionner et garder à vue des jours durant, pour interrogatoires sans sommeil, une foule de progressistes militants ou non.
On a pu aussi admirer la formule dite, pour renvoyer dos à dos les sadiques et leurs victimes, par Monsieur Eric Ciotti, député dans la région PACA dont la pureté électorale et la santé sécuritaire ne sont plus à démontrer. Il a prononcé que "la violence n'a pas de couleur politique". Indépendamment de ce qui est formulé dans le "Z" de Costa-Gavras (l'avocat joué par Denner dit : "va leur expliquer que c'est toujours les nôtres qu'on assassine"), c'est, au lendemain de l'assassinat de Clément Méric, d'une rare délicatesse : mais il est vrai que les meurtriers n'étaient ni UMP ni PS, c'est-à-dire des "couleurs" que Monsieur Ciotti considère sans doute comme seules perceptibles. A moins que son daltonisme ne lui rende "compréhensibles", comme à son maître Fillon de Sarkozy, les réactions racistes cultivées par et pour l'afFront Nazional, et qu'ainsi il admette celui-ci dans son champ visuel.
Mais il faut attendre avec une attention particulière la réaction d'Alain Soral. Cet auteur — en tout cas signataire de quelques livres — s'est fait une spécialité de pousser plus loin que les Le Pen une incohérence puante : d’un côté, la dénonciation partielle mais carrée de l'ordure bourgeoise et financière en place ; et de l’autre côté, l'incitation aux crimes par les clichés les plus immondes du racisme et en général de la réaction, notamment contre les Algériens de banlieue ­— tout en protestant que le communisme est l'héritier naturel de l'élan de fraternité chrétien et que Staline est largement dénigré par les déviants du trotskisme —. Peu importent d'ailleurs ces détails : SORAL INCITE A LA HAINE ET DESIGNE DES CIBLES, y mêlant Bernard-Henri Lévy et les "z'y va", comme il dit. Comme la cohérence dans la réflexion politique n'est pas le fort de grand monde, il serait stupide et mortel de ne pas croire à l'efficacité "populiste" d'un tel "programme".
Il y a donc des raisons de supposer que le sieur Soral va beaucoup tenter de se faire entendre ou lire dans les semaines à venir : qu'il soit médiatisé-"diabolisé" à son tour ou non, il faudra suivre de près ce qu'en font les divers media, et ne pas laisser idiotement se reproduire pire que les Le Pen en horreur et en publicité.
Un des ennemis contre la vérité, non des moins dangereux, sera le mépris hautain mais muet de ceux qui "ne veulent même pas entendre parler" de Soral. Mais quoi : ce n'est pas d'aujourd'hui que les êtres de savoir et raison ont contre eux toutes les absurdités.