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Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


jeudi 24 janvier 2013

Actuel 33 : Wikipedia


Pour ne pas se faire écharper par ses trop nombreux clients, il vaut mieux reconnaître d'abord qu'il peut être commode de faire appel à cette chose — de préférence dans la version anglaise et tant qu'il s'agit par exemple de préparer une excursion de rinçage de cervelle dans un village perdu du Danemark ­—.
Mais s'il s'agit d'affaires sérieuses, on est bien obligé de reconnaître publiquement qu'au moins la version française est un scandale dans la ligne des plus vicieuses propagandes, ecclésiastiques en particulier. On tient là un remarquable exemple des détournements de pensée qui étouffent en ce moment le progrès, et tant pis si sa dénonciation choque d'abord le beauf ordinaire — et aussi, hélas, pas mal de gens plus estimables.

Il y a d'abord le contexte : la référence à Wikipedia est systématiquement affichée en tête des recherches par Google et, lorsqu'on s'est donné la peine d'étudier les connexions de ce moteur de recherche à la CIA, c'est déjà de quoi méditer. En outre, de plus en plus fréquemment de tels résultats noient la vérité dans une quantité décourageante de références (des millions, on se demande par quels vagues liens) : ce qui fait se contenter de regarder les premières pages, et contribue ainsi à égarer astucieusement le lecteur. La base est donc claire : orienter à tout prix, désorienter idem. On va voir pourquoi — et si on s'en doute, il est important d'en observer le fonctionnement. En raison de caractéristiques particulièrement parlantes dans des cas particulièrement sensibles, on s'arrêtera ici à deux révolutions : Galilée surtout et, hélas par allusion seulement, le 1789 français.

Ce qui est dit sur Galilée dans Wikipedia, spécialement dans la version française, est un cumul de dévoiements pour ramener à la propagande catholique et à ses faux — historiques, juridiques, bureaucratiques — inimaginable pour quiconque n'a pas une solide culture de l'affaire. Il faut donc tenter d'abord d'en rappeler la ligne principale.
Galilée est le principal auteur en affaires de méthode et philosophie expérimentales :
– jusqu'à Galilée, sur tous les sujets, plus particulièrement en Occident chrétien, la référence était religieuse, donc de ce côté du monde la Bible, même ou surtout en contradiction flagrante avec les faits — même, parce que c'était parfois un peu gênant ; surtout, parce que ça obligeait d'autant mieux à la soumission mentale, à l'abdication de liberté, renoncement inséparable de toute foi religieuse —
– après Galilée, CETTE RÉFÉRENCE EST MISE DE CÔTÉ AU PROFIT DE CE QUI EST VÉRIFIABLE ET CONTRÔLABLE PAR TOUS, d'abord en physique, puis (curieusement) en économie (Petty), puis en biologie (microscope et microcosme, observations géologiques, dérive des continents et classifications notamment paléontologiques) puis de façon de plus en plus globale et nette (Diderot et l'affirmation clairement énoncée que la philosophie, comme toute connaissance, ne saurait être qu'EXPÉRIMENTALE) : ce qui a permis de ridiculiser en particulier le créationnisme, en général la foi, et ça continue.
Ainsi : jusqu'à Galilée, "le grand livre de tous les livres" était la Bible (au moins en Occident) ; après Galilée et une fois pour toutes, comme il n'a cessé de le répéter à travers les emprisonnements et les tortures ecclésiastiques, "LE GRAND LIVRE DE TOUS LES LIVRES EST CELUI QUE LA NATURE TIENT ETERNELLEMENT OUVERT SOUS NOS YEUX".
Telle est la vérité, telle est l'immensité.
Or la bureaucratie vaticane avait vu venir l'audace aussi tôt que ceux qui soutenaient Galilée. Pour cela, dès les années 1610, elle avait préparé tout un scénario d'admonestation solennelle fondé sur un faux, fabriqué par elle (cf. les minutes du procès, par exemple dans l'édition par G. di Santillana) : elle voulait pouvoir prétendre, au moment qu'elle choisirait, que Galilée avait reçu l'injonction de ne pas enseigner le système astronomique rationnel (convenablement revu et corrigé longtemps ensuite en doctrine "de Copernic" pour la récupération catholique, alors que le schéma était d'Aristarque de Samos ; en fait et fait essentiel, Galilée savait parfaitement que, Soleil ou Terre, il était insensé de "chercher à l'univers un centre", quelque centre que ce soit, comme il l'a dit et répété) ; ce déplacement éhonté du débat — tout focaliser sur le "géocentrisme" (la Terre comme centre du monde) pour voiler l'essentiel, LA MÉTHODE EXPÉRIMENTALE — relève des procédés ensuite volontiers affectés au nom de Staline : mais ceux-ci étaient en réalité complètement et régulièrement ceux de l'Inquisition, en un âge où le petit père des peuples était encore bien jeune.
La réussite de ce détournement a été largement entretenue par une suite encore actuelle de tricheries, perfidies, infamies et mensonges. Par la grâce de quoi, qu'on demande autour de soi ce qu'est l'affaire Galilée, même auprès de gens fort cultivés : presque tous parleront de "géocentrisme", d'"eppur si muove" et autres légendes, et PRATIQUEMENT PERSONNE, MÊME DES SAVANTS, DU BOULEVERSEMENT QU'A ÉTÉ POUR L'HUMANITÉ ENTIÈRE L'AVÈNEMENT EN CLARTÉ DE LA MÉTHODE EXPÉRIMENTALE — à savoir : d'abord constater les faits pour ensuite théoriser, dans l'indifférence qu'il faut aux assertions des prophètes de tout poil, spécialement Aristote et Thomas d'Aquin, références imposées par l'Eglise et ridiculisées par Galilée —. Cette incroyable ignorance se perpétue grâce à des monstruosités comme Wikipedia et les thuriféraires de l'enseignement de type "positif" — la science hors de ses incidences philosophiques.
A partir de ces données, sur une affaire à présent complètement éclairée et documentée, on ne peut pas comprendre que la pourriture répandue par la Sainte Congrégation "de propaganda fide" soit encore si présente aujourd'hui, sans mesurer l'acharnement dans l'obscurantisme de l'Eglise, avec toutes ses antennes jusque dans les académies des sciences. Cela doit faire saisir l'importance à la fois du sujet et de la tricherie. Les affirmations de laïcité sont très largement parolières tant qu'un enseignement de l'affaire Galilée n'est pas imposé à tous les niveaux d'instruction et d'éducation, et cet enseignement n'est pas fait. Or il ne peut y avoir de citoyens pleinement informés et instruits si on n'éclaire pas ce que ce procès à l'esprit a représenté et représente encore : le plus grand crime contre l'humanité ayant pris pour cible un individu — celui coupable d'avoir découvert ce que peut apporter la méditation organisée sur le réel —. Ceci n'est pas écrit pour oublier les innombrables autres persécutions de l'Eglise contre le savoir : c'est pour focaliser sur le plus considérable dans le domaine de la pensée. L'humanité ne sera libre que quand elle s'insèrera consciemment dans l'ère galiléenne, la prise de conscience expérimentale — dans ses incidences scientifiques comme démocratiques dont si peu encore sont capables de percevoir la complète intrication, avec tout ce que cela commande de conditions d'équilibre humain —.
Tout ce qui va dans le sens de cette prise de conscience est favorable à l'humanité. Tout ce qui va à l'encontre menace sa survie même.

Et cependant, se laissant aller à des réflexes de pure forme — comme des raffinements d'anecdotes sans intérêt, ou le ton patelin des censeurs —, un tas de gens trouvent qu'après tout les cardinaux de l'espèce Poupard (chargé de la désinformation sur l'athéisme pendant de longues années par Jean-Paul II) sont fort instruits et intéressants quand ils parlent de science, et jugent Wikipedia sur les mêmes critères !

Les dimensions acceptables ici doivent faire s'arrêter : mais la consultation, sur le même antidictionnaire, de données sur faits et êtres de la Révolution française a aussi de quoi faire vomir. Il suffit pour le voir de prendre deux ou trois personnages, même des plus connus (sans parler de Chalier ou Babeuf), des années 1789-90, et comparer leurs notices sur Wikipedia français d'un côté, et de l'autre dans les notices extraordinaires de Gérard Walter — cf. l'édition en Pléiade-nrf de l'"Histoire de la Révolution française" due à Michelet.

On pouvait entendre sur les ondes, voici quelques semaines, une pauvre idiote déclarer qu'elle était évidemment bien plus savante que ses grands-parents, de par cette raison : elle prétendait savoir se servir d'Internet !
Ecole, école, école de la République ! où en est-on ?

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