Il est
tout à fait juste de tenter de réveiller les citoyens de la narcose médiatique.
Il n'est pas sûr que les alternances d'alarmisme, triomphalisme et
catastrophisme constituent de bons moyens d'y parvenir.
Un site souvent plus que respectable, proposé
en lien depuis ce blog, a affiché sur de longs mois de l'an passé :
"Death of the dollar 2014". Or au début 2015, le dollar et donc la
livre britannique ont retrouvé leur plus haut niveau par rapport à l'euro,
tandis que celui-ci achevait de couler par rapport au franc suisse. Le fait monétaire
n'a certes rien de réjouissant — c'est un indicateur effroyable de la puissance
relative, de ce qui est encore un peu humainement contrôlé, vis-à-vis des
mafias, des maffinances qui triomphent aujourd'hui — : mais il n'est pas
plaisant que s'y ajoute le ridicule de gens qui par ailleurs diffusent souvent des
faits, essentiels à la compréhension de la déchéance présente. Si l'on veut
inspirer confiance, il faut éviter de se poser en prophète, surtout si c'est
pour étaler des prophéties dont l'absurdité ne tarde guère à éclater.
C'est d'autant plus grave qu'à force de
mentalité scoop, on aide à
faire confondre des sottises avec des affaires d'une extrême gravité. Les
annonciateurs de la "fin" du dollar, dont on vient de parler, ont publié des masses d'articles
souvent remarquablement documentés, plus angoissants les uns que les autres, sur
les provocations et le coup d'Etat néo-nazis en Ukraine, et sur la manipulation
par l'OTAN des foules dans ce malheureux pays. Or quand on voit la mappemonde
d'un peu plus haut, il n'est pas évident que ce soit là le cœur du drame énorme
où l'humanité entière est menacée : il faut voir l'Asie centrale, les
hydrocarbures et la remontée des frontières vers Moscou depuis les anciens
Etats musulmans d'Union Soviétique, aussi bien que les hydrocarbures un peu plus bas autour de la
Syrie puis de l'Arabie — et il ne serait pas mauvais de voir le fond, que les hydrocarbures ne sont qu'un aspect de la
lutte pour l'automatisation à outrance, la politique de chômage imposé et par là
l'asservissement des peuples par les technologies, dans une politique générale
de volonté de pouvoir à tout prix où l'économie est à peine un relais, jamais en elle-même un moteur —. En tout, du côté de l'Ukraine, effectivement il
y a menace gravissime pour la vie et l'espèce humaine à l'échelle de la planète,
mais il est navrant que cela soit rangé à côté de divagations sur les monnaies.
Là-dessus,
des textes de déjantés sur la science ne peuvent pas aider à voir clair. Or
tout récemment on a vu passer des avertissements, sur ton prétendument tout
ensemble affolé et docte, à propos d'expériences du CERN (Centre Européen de
Recherches Nucléaires), où il est question que le gros anneau installé près de
Genève déclenche la "fin" de notre part d'univers — rien que ça. Ce qui suit va demander un peu de
méditation, au lieu de la simple aptitude à se laisser effrayer, mais l'idée
qu'on se fait ici du respect du lecteur exige aussi davantage que le simple
effroi.
Pour autant qu'il soit possible de donner idée de
l'affaire en quelques lignes, la physique contemporaine mène, dans un empirisme
souvent révoltant, des séries d'essais destinés à rapprocher du rêve
einsteinien et scientifique : la conception unitaire qui rassemblerait dans une même synthèse les
extraordinaires nouveautés, quantiques, dans le "microscopique", et
les extraordinaires nouveautés, de description plus directement relativiste,
dans l'astrophysique et le super-"macroscopique". Autrement dit, dans
le principe le domaine de
recherche du CERN est synonyme de science. Mais hélas dans ses menées
effectives, c'est une négation
honteuse des exigences de compréhension et rigueur sans lesquelles ce nom de
science est purement et simplement volé. On va tâcher d'expliciter un peu les
deux volets de ce diptyque maladif.
Le plus
simple est sans doute de partir d'un exemple. Il y a dans les classifications
encore actuelles de la physique quatre types de processus longtemps étudiés de façon séparée :
le gravitationnel, l'électromagnétique, les phénomènes radioactifs dits faibles, et les forts. Bien sûr il faut en avoir une vue unique, alors que les abords expérimentaux
les présentent d'abord comme indépendants les uns des autres. Les tâtonnements
— dont une bonne part au CERN, justement — ont amené à voir assez rapidement
que l'électromagnétisme et l'interaction faible n'étaient que deux expressions
d'une même réalité profonde, au point qu'on parle aujourd'hui d'interactions et
courants électrofaibles. A la
racine de tout cela, il y a une description d'une part à l'aide de ce que tout
le monde appelle des particules, alors que (du moins isolé) ce mot n'a aucun
sens en la matière, et d'autre
part à l'aide de ce que tout le monde appelle des champs, alors que (du
moins isolé) ce mot n'a aucun sens en la matière : nul n'a su encore, en effet, éclairer
proprement que les phénomènes de base de la nature ne peuvent être conçus
clairement ni en termes d'ondes
ou champs, ni en termes de
particules, les uns et les autres étant de simples images tirées d'espaces
continus sans réalité assez précise. C'est le problème central légué par
Einstein, qui a compris mieux que tout autre de son temps, et mieux que presque
tous les physiciens du nôtre, le manque de fondations assez solides à nos théories
physiques.
Seulement les théories, aussi bien des
physiciens derrière leurs vanités patamathématiques, que surtout des "industriels",
sont des choses dont les Etats et pouvoirs se foutent complètement. La "théorie"
électrofaible a beau être bancale dans ses "grosses coutures" comme
disait Feynman, elle éveille des espoirs fous. Car un des gaspillages les plus considérables des centrales dites nucléaires
est le passage par des processus mécaniques de la chaleur produite par les réacteurs :
seule une partie de l'énergie
fournie par l'uranium devient d'abord mécanique (des turbines) et ensuite électrique
(par les alternateurs accolés aux turbines). L'électrofaible pourrait donner
le passage direct de "la" radioactivité à l'électricité, en
court-circuitant l'énorme ferraillage de machines à vapeur puis d'alternateurs
des centrales actuelles. On devine
l'intérêt pour les consommateurs d'énergie et utilisateurs de robots au lieu
d'ouvriers : le pétrole peut bien finir, si le "tokamak" (la machine directe
radioactive-électrique) fonctionne on s'en fout.
D'où les énormes investissements en ces
affaires, où on ne sait même pas de quoi l'on parle (ni "ondes" ni
"particules"), mais d'où l'on peut faire des armes nouvelles,
civiles et miltaires, contre tous les peuples. En fait l'exemple ci-dessus est dépassé dans le détail, mais tout ce
qu'il y a d'actuel dans le principe.
Ce ne serait déjà pas mal pour comprendre les dépenses
du côté de ces perversions à retombées techniques immédiates, contre la
science et contre les gens. Or il
y a beaucoup plus fort dans ce détournement du fruit du travail par les Etats
notamment capitalistes — un des pontes de cette fausse science a appelé avec
insolence ce détournement "le soutien sans faille des contribuables"
—. Car on a fait du chemin, mais dans la même incohérence, en direction de la
synthèse des quatre
"interactions" connues de la nature. Du coup, on est peut-être déjà
capable de recréer des conditions de début de notre part d'univers, où la
distinction entre ces divers aspects n'existait qu'en germe. Ce sont des
conditions à nos yeux extrêmes où toutes les valeurs — de ce qui se traduit
ensuite par exemple en densité, pression et température — n'ont plus de
signification pour le profane. Ces états mal imaginables se retrouvent dans les
"trous noirs", les sortes d'aspirateurs du cosmos qui rongent même
l'espace et le temps à force de ramasser la "matière".
Quand on a passé un peu de temps avec des
physiciens, et surtout les gens qui se retrouvent à la direction du CERN, quand
on a pu vivre la stupéfaction, de leur ignorance des exigences théoriques
scientifiques et de leur insensibilité aux retombées humaines, ce qui précède
suffit à avoir peur. De là à publier un article sur la "fin" du monde, comme il s'en est vu récemment sur
un des sites "alternatifs", il y a saut d'un risque, très réel mais
très mal délimité, à l'absurdité de mauvaise science-fiction qui fait de l'accélérateur
du CERN la création potentielle d'un "trou noir" qui anéantirait la
Terre, et tant qu'à faire notre galaxie et notre métagalaxie tout entières...
C'est
dans un esprit de compréhension globale et d'intelligence générale qu'il faut
creuser ces zones. Il ne faut ni se laisser bousculer par les cinglés au
pouvoir, potentats d'Etat ou de groupes financiers dits industriels, ni par les
autrement cinglés qui se précipitent pour vous "alerter" dans le sens
d'autres égarements. L'état du monde mérite en même temps la rationalité exigeante d'Einstein comme de
Lorenz, et celle de Martin du
Gard comme de Camus. Nul ne prétend que ce soit facile. C'est seulement
indispensable.
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