Pour
sourire un peu...
Le périodique de janvier 2015, distribué aux
adhérents de la MAIF, reproduit en traduction une interview accordé à la
mutuelle en novembre 2014 par Jeremy Rifkin à propos de son dernier livre :
il y déclare la fin du capitalisme parce que bientôt beaucoup de gens pourront
produire eux-mêmes des joujoux gratuits. Les potes à qui j'ai déjà parlé de ma réaction (vive) se sont fichus de
moi sur le thème "Alors Avra, on suit le buzz ?" Je réponds
d'abord un peu en renvoyant à deux textes d'il y a bien des années, ce qui
n'est pas buzz, et gratuits, répétons-le :
c'était
dans l'immortelle revue V&L,
accessible dans son intégralité ou presque par les liens ci-dessus et par les
liens de ce blog — donc gratuitement, SI vous disposez d'un ordinateur, du temps et de la culture qu'il faut pour
lire ces travaux et y comprendre quelque chose —. On lit dans ces deux références
déjà bien des choses sur Rifkin — et sur une préface d'un ancien chef de
gouvernement français qui fait sans doute partie des très influents personnages
de son public (les "nombreux chefs d'Etat" dont notre auteur est
conseiller, à ce qu'il dit modestement).
V&L exposait donc déjà, à cette époque lointaine, des choses qui sont
devenues depuis encore bien plus actuelles et sinistrement ignorées, notamment la
primauté absolue du politique sur l'économique dont Marx (avec excuses et atténuations) n'a
finalement guère tenu compte, et à laquelle les marxistes (sans aucune excuse désormais)
n'ont rien compris :
l'histoire de l'humanité n'est pas celle de la lutte des classes, ni affaires
de rapports entre forces productives et rapports de production, mais celle de
la lutte entre savoir et pouvoir —
c'est-à-dire bataille entre prise de conscience rationnelle et au contraire déchaînements irrationnels tels que guerre et volonté de pouvoir, bataille entre
prise de conscience des nécessités
de socialisation (à terme fraternité humaine), et au contraire refoulement de l'animalité grégaire et agressive en
constructions INconscientes, barbares,
jusqu'ici très fortement majoritaires dans l'épouvantable aventure de notre espèce.
Autrement dit, les féroces actuellement au pouvoir peuvent bien laisser des
gens de culture rare jouer assez finement avec des logiciels pour produire des joujoux
gratuits : mais d'abord ces
féroces font tout pour
que les gens de culture, et leur culture, demeurent rares ou deviennent
rarissimes. Ensuite, avant de
laisser produire des hôpitaux, des écoles, des autoroutes et des réseaux télématiques
performants gratuits, ces brutes auront monopolisé la production des
ordinateurs, des logiciels et des serveurs de telle façon qu'ils garderont les
peuples à leur merci, notamment par l'extension d'esclaves consentants dits
commerciaux et de hordes "de l'ordre", du seul qu'ils
acceptent : leur ordre où,
tant qu'ils auront le pouvoir, rien qui permette l'expression assez large de la volonté
démocratique et populaire ne sera jamais gratuit mais, tout au contraire,
demeurera ce qui est le plus dangereux, des dangers les plus mortels.
Contrairement au très-bien présentant sieur
Rifkin, ni sous mon pseudo — "redire" — dans ce blog, ni sous mon nom
dans la revue déjà dite, je n'ai jamais conseillé ni cherché à conseiller
quelque potentat que ce soit. Tout à l'opposé de telles fréquentations, chacun
de mes lecteurs peut voir que Rifkin se trompe totalement ou veut tromper
incroyablement, s'il imagine ou veut faire imaginer une seule seconde que les
rapports de pouvoir vont s'éliminer
magiquement par "abaissement des coûts marginaux" : c'est se
foutre purement et simplement de la gueule du monde, de tenter de faire rêver à
un monde meilleur de par les "contradictions" (simplement économiques en plus !), du monde actuel, réel.
Il fut un temps — celui des fondateurs — où les
sociétaires de la MAIF, avec plus ou moins de netteté, sentaient assez fort de
telles choses pour inciter à la lutte politique : la lutte pour qu'une majorité de plus en
plus large de citoyens se dresse contre le pouvoir, contre tous les
potentats. Ces temps semblent révolus :
du moins des interventions comme celles de Rifkin, et la souscription à sa
publicité par la MAIF, les éloignent du présent de manière accélérée. Il faut
donc compter sur bien autre chose : heureusement la vie associative ne
s'arrête ni à la production de joujoux gratuits, ni à la chefferie actuelle de la MAIF.
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