bienvenue, welcome, welkome,etc

Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


mercredi 25 janvier 2012

Actuel 2 : "Elections, piège à cons" version 2012


Chers amis,


Tu permets ? On dit vous à une seule personne, en marque de politesse bourgeoise : je dirai tu, s'il te plaît, à vous tous.
C'est de votes que je veux te parler. J'enrage que tu te laisses prendre au cirque électoral, ne serait-ce qu'en allant faire tamponner ta carte d'électeur pour déposer ensuite un blanc ou nul : tu croiras avoir prouvé que tu n'agis pas par flemme, mais en fait tu satisferas à l'obligation que Monsieur Charles Pasqua appelait un devoir "civique" — c'est écrit dessus —. Eh bien, si tu veux, tu chercheras sur la Toile ce qu'a été le sinistre SAC, "Service d'Action Civique" de Pasqua, le parrain de Bling-bling : tu pourras suivre, à partir de ces gens-là, la fascisation de la police en France. Pour éviter de se montrer trop évidemment appuyés sur la flicaille, nos ennemis usent du passage sous le chapiteau à urnes : ils font ainsi avaliser comme démocratie leur sorte de "civisme". C'est contre ta participation à cette horrible farce que j'écris.
Tu sais beaucoup de ce que je vais dire, mais rien n'en est encore ressorti ; tu n'as qu'à voir les derniers locataires de l'Elysée : pas un ne représentait tes espoirs, ni la volonté de mieux-être populaire. Pour revenir à l'action sur le réel, il faut s'expliquer ; il faut, au lieu d'agitations,  passer enfin un peu de temps à comprendre pour dominer.
Pour cela, je te propose d'aller voir aussi loin que possible vers la droite, d'éclairer ce que représentent les gens que tu vas voir sur des affiches, et dont les noms te sont déjà martelés depuis des mois — alors que, si nous étions en démocratie, la poussée serait dix ou cent fois moindre : mais entre les mains des groupes financiers et de leurs obsédants media, il faut toute force pour faire entrer la chaîne de moutons dans l'étrangloir des suffrages —.

On commencera par certains que, non seulement des téléspectateurs-électeurs, mais de véritables citoyens envisagent. En tant qu'individus, les deux François, Bayrou et Hollande, provoquent souvent à juste titre ton mépris, et à très injuste titre tes haussements d'épaules. Car, je te le dis comme je le sens après de nombreuses décennies d'histoire, tu as tort. Ces marionnettes sont très caractéristiques à la fois de ce qui peut attirer des voix dans une France pesamment vieillie, et des dangers mortels qu'il faut se résoudre à voir.
Sur cent électeurs, il ne peut guère y en avoir plus de cent, même avec toutes les tricheries électroniques. Si tu admets cela, tu dois aussi admettre que des Français s'apprêtent à voter pour des horreurs : et en effet tout se passe dans le dévoiement des expressions démocratiques, en utilisant la multiplication des candidats soutenus par les banques, en appelant à des réflexes de traditions ou autres, tous complètement inactuels. Et ça marche. Tu dis que tu le sais bien : je dis que tu le sais mal, ou nous ne serions pas où nous sommes.
Faut-il écrire : à tout saigneur, tout déshonneur ? En tout cas il faut commencer par Bayrou. Tu t'apprêtes sans doute à sauter ce paragraphe. Encore une fois, tu as tort. Car s'il est vrai que les partis démoniaques-chrétiens ne sont pas en France ce qu'ils sont en Italie, ils n'en ont pas moins un rôle extrêmement efficace électoralement. Si tu as saisi un peu de l'importance de l'histoire, de l'énorme et toujours disponible expérience historique, va repenser un peu la mise à l'écart des "front-popu" dans la Résistance ; occupe-toi d'apprendre ce que représente l'élimination, déjà en pleine guerre, de Jean Moulin par les inféodés à la future CIA-Vatican, Frenay, de Bénouville, et Georges Bidault dont héritèrent Monnet, saint Robert Schuman, Le Monde et "l'Europe" de la finance surtout papiste : ce que tu vois maintenant éclater partout. Ces gens discrets, silencieux et minoritaires, ont constamment réussi à entraîner toujours plus à droite, depuis plus d'un demi-siècle, les deux Républiques qu'ils ont honteusement infiltrées — avec grand succès ­ pour eux —. Va relire l'héritage passé par le MRP, et les Foyer, les Lecanuet et autres. Bayrou, c'est ça, et il en a fait étalage comme "UDF" :
– c'est l'art d'être un groupe sans grande importance numérique qui permet de faire basculer les votes toujours plus à droite en se posant d'abord en équilibre, en arbitre : et ensuite, soit on se déchaîne contre les pseudo-socialistes d'abord "alliés" (car la fureur et la calomnie contre la tradition égalitaire sont cultivées en toutes circonstances), soit on se pose en "opposition constructive" des réactionnaires plus dévergondés pour mieux les laisser agir
– mais c'est aussi une arme essentielle de la réaction dans la modernité, l'actualité qu'ils disent : le sens de l'action à long terme, et la priorité toujours accordée à ce centre du politique ; une certaine Eglise sait cela, elle, bien mieux que toi et beaucoup d'autres ; tu peux bien tourner ta colère contre moi : mais tu n'empêcheras pas que Bayrou fasse quelques pour cent au moins ; en fait, les grenouilles de bénitier et les ruraux de souche aidant, il fera sans doute davantage : ce sera toujours ça de retiré aux cent qui croient dans leur petit bulletin, et à des endroits sensibles (limites du vote PS) — bref l'idéal pour les manipulateurs de votes.

Hollande ensuite. Là aussi, un monde bien ancré de trahison du peuple. Vers 1936, quand malgré les déchaînements fascistes il a fallu tenir compte des marées et des foules humaines dans toute la France, on a laissé en devanture un bonhomme pas très radical mais souvent encore bien trop ferme au goût des financiers : Léon Blum. Tu sais que Léon Blum dut contourner sa propre majorité parlementaire sur l'énorme affaire de la guerre d'Espagne et que, tout en se déclarant pour la non-intervention de façon à conserver du pouvoir, il fit organiser un circuit clandestin de livraison d'armes à la République d'outre-Pyrénées ; dans ce circuit fit ses classes un organisateur dont l'efficacité n'eut d'égale que l'immensité d'idéal et de courage en tous instants : Jean Moulin...[1]








[1] Peut-on te demander, sans te fâcher, si tu sais bien le détail de ce qui s'est passé contre Moulin à Caluire ? si tu connais le René Hardy qui le livra après avoir livré Delestraint , sur les instances du clan déjà dit, Bénouville-Frenay-Vatican-Allen Dulles-Monnet ? Sais-tu assez séparer, dans ce monde de rétention de l'histoire comme de l'information, les Résistants que tu admires et au contraire les chiens de garde du capital infiltrés parmi eux, simplement parce que, même dans le capital, il y avait des gens assez peu idiots pour bien voir qui gagnerait finalement la guerre ?

Donc vers 1936 il y eut Blum, accompagné en situation plus qu'instable des staliniens à la tête du PCF. Cela ne pouvait guère durer. Cela ne dura guère. Il y avait trop de personnages qui, sous l'étiquette de socialistes, n'étaient là que pour trahir le socialisme, et que des financiers manœuvraient — dont Boussac par exemple, de ces furieuses fortunes de textiles du Nord dont un héritier au moins, Seillière, doit te dire quelque chose —. Parmi ces personnages, il y avait une ordure un peu plus puante que les autres, Paul Faure. Ceci n'est qu'un abrégé d'abrégé ; donc sur lui juste une touche : Paul Faure avec la bonne majorité des Pseudo-Socialistes, le PS de l'époque (SFIO), aida dès qu'il put à faire chuter Blum et peu d'années ensuite vota (et fit voter) les pleins pouvoirs à un certain Maréchal Pétain. Tu connais ?
De Gaulle tenta, après la Libération, de circonvenir Blum sorti miraculeusement des camps de la mort, et de maintenir au moins en façade une unité de la Résistance qui au fond le gênait. Blum refusa. Mais dans la lignée des faux-jetons PS, il ne manqua pas de premiers rôles de remplacement : tu te souviens de Jules Moch, créateur des CRS contre les grèves de mineurs qui osaient demander leur part dans la reconstruction de la France ; tu te souviens de l'inénarrable Guy Mollet, dit la Tomate après sa fuite devant les superpatriotes d'Alger préparant le coup d'Etat de mai 1958.
Les choses se compliquèrent un peu avec l'art politique de Mitterrand. Nul comme lui ne sut se faire des valets des gens du PCF — les "garçons de courses" du premier gouvernement après 1981 —, et réduire à rien un parti qui, par inertie historique solidement ancrée dans la folle espérance populaire, faisait encore 20% des voix un bon tiers de siècle après 1945. Ce Mitterrand adouba Jospin, dont Allègre, et assit par là le massacre parachevé de l'Instruction Publique et le lit fait aux hystériques du "sécuritaire".
Hollande est l'héritier absolu de cette lignée.
Et pour éviter à tout prix le retour au pouvoir de Bling-bling, tu vas peut-être voter pour ce François-là dès le premier tour des prochaines présidentielles. Ne dis pas non. Ne te contente pas de nier l'évidence. Ne refoule pas de ta pensée ceux, tout proches de toi si ce n'est toi-même, qui mettent en priorité leur colère contre un soi-disant président démocratiquement élu — en fait environné désormais d'une haine si totale qu'il ne peut plus se déplacer que rampant et caché sous des escouades de flics très spéciaux au bleu très sombre. On peut comprendre cette haine. Mais non la laisser déterminer un comportement, en affaires d'urnes ou autres.
            Car tout ce que tu peux espérer si Hollande l'emporte, comme les manœuvres de scandales y poussent en ce moment, c'est d'avoir de "l'alternance" de devanture : tu auras servi à conforter l'illusion de pseudo-démocratie entretenue par la finance. Après que la droite brute ait poussé le bouchon aussi loin que possible, donc une fois les destructions sociales et les profits spéculatifs explosés, le relais sera passé à Hollande. Alors celui-ci prétextera le legs catastrophique de dettes, publiques et autres, hérité de l'UMP ; il y aura une nouvelle "dégradation de la note de la France" par les gangs d'agences "de notation" ; et ce "motif" entre tous financier servira à figer dans la durée le résultat, pour le moment encore instable, des passages en force opérés sous l'actuel président. L'essentiel, ta vie et celle des plus jeunes, n'en changera pas d'un iota.

Compte, maintenant. Entre les rageurs contre le quinquennat déjà largement écoulé, les affolés de fureur contre la destruction du service public en tous domaines, et les pauvres gens qui s'imaginent pouvoir changer la politique des financiers dans la modération, en somme entre tous ceux qui croient au vote, dis-moi, où en sommes-nous déjà ? Cherche encore plus loin.
Il y a, même parmi les électeurs du FN, c'est vrai, les pauvres bougres isolés du monde politique au point de croire que TF1 ou d'autres poubelles les informent, et qui apprécient la dénonciation des faux-jetons d'où qu'elle vienne. Mais refuseras-tu de voir ceux qui, en usine, rendent à leurs camarades immigrés les gifles que leur donne le patron ? es-tu aveugle aux paysans-petits-commerçants-artisans et autres adorateurs de l'ordre répressif, jouissant du mal fait aux autres ? ignores-tu les immigrés depuis une ou deux générations qui ne pensent qu'à empêcher leurs frères de misère d'hier de venir, croient-ils, les concurrencer ? Car c'est surtout cela, la "mentalité" FN et le "populisme" : c'est la frousse de montrer haut et fort ce qu'on est et ce qu'on pense, la frousse de penser, au profit de la fausse colère et du secret des urnes — UDC en Suisse, et pareil en Italie, Autriche, Pays-Bas, et j'en passe —. Le principe dont jouent les brutes du monde actuel, c'est ça : l'abjection animale en politique ; il faut oser la reconnaître dans les votes "de protestation" FN. Ce sont de faux humanistes qui s'attardent à refouler cette évidence, tandis que les ennemis l'utilisent.
Sur ce thème sais-tu, toi qui crois m'insulter en me traitant d'intellectuel, ce que c'est que l'éthologie et l'animal dans l'homme ? et t'en sers-tu pour la cause, comme nos ennemis contre elle ? J'ai un peu plus peur : car il faut un nouvel effort pour comprendre ce que je viens d'écrire. Fâche-toi : moi je ne cherche pas à me faire élire, je n'ai que foutre de la démagogie flatteuse ; et donc je t'écris : ignorant ou idéalisant le réel, tu veux trop sentir une simple ambiance au lieu d'une vraie communauté, tu veux te féliciter d'être parmi tes chéris et simplement continuer à naviguer au sentiment, d'après ce que les copains choisissent et des bruits un peu triés. L'essai d'intelligence à partir d'une connaissance toujours plus générale, ce meilleur de toi, tu le ranges sans même t'en rendre compte à la cave...
Mais en face, les gens de pouvoir additionnent maintenant à Bayrou et Hollande toutes les formes de droite féroce — organisées, elles, pour faire leur union à temps —. Sur combien de votants alors peuvent-ils compter ? Et nous ?


Laissons la poussière des imbéciles qui, sous prétexte de "faire entendre une voix" à propos de thèmes annexes, vont encore disperser des votes et libèrent encore le champ et le choix des "équilibres" aux manœuvres des financiers. Laissons les rigolos tristes qui se réclament du meilleur de l'héritage marxiste et achèvent d'en écarter. Accédons aux deux risques supplémentaires qui, à côté du vote PS de désespoir, te carrent très efficacement et concrètement dans l'impuissance et te manœuvrent sans rémission.
C'est un bon parleur que Mélenchon. Il sait reprendre en termes actualisés les exigences de base d'une vraie critique de la monnaie et de ses accaparements, donc une vraie « critique de l'économie politique » comme on a dit, et bien dit. Ce serait mieux qu'un tribun s'il consacrait davantage de temps à l'unité de nos forces, et moins d'efforts à délimiter son camp. En attendant, il remplit au mieux le rôle de division de ceux qui pourraient se retrouver, car il a derrière lui un résidu historique de première classe écœurant pour beaucoup. Mais il faut que je te laisse tout de même quelques raisons de voter, et par respect humain je déclare ici assez volontiers que Mélenchon, ex-membre de gouvernement PS, a le réformisme aussi honorable que possible.
J'ai conservé pour la fin la seule que je respecte, moi, vraiment. Eva Joly est beaucoup trop ce qu'on peut souhaiter, en affaires de dirigeants politiques, pour avoir la moindre chance par les urnes. Courageuse, luttant contre les "banksters" mafieux de la mondialisation financière, encouragée des espoirs de beaucoup qui s'efforcent de comprendre activement, elle ne récoltera qu'un succès d'estime et de quelques-uns. Au dernier moment, les efforts du pouvoir UMPS-"Centre"-FN ressortiront en concurrence écolo une saleté quelconque, et ils éviteront qu'elle se fasse seulement entendre assez fort. Car elle veut trop dire juste dans un brouhaha où seul compte le coup de gueule démagogique — la "comm" —. Elle propose trop de choses déjà concrètes pour ne pas être assaillie par les infiltrés de RG devenus IG, qui lui ont recommandé par exemple très astucieusement d'enfourcher des histoires de 14 juillet au lieu de la laisser sur le terrain où elle est la plus forte, et imparable.
Compte. Elle fera entre quatre et huit pour cent, et achèvera d'enfermer en défaitisme nos plus sûrs soutiens : malgré tout ce qu'elle aura pu dire, ce sera encore la mise en place, la revoyure, d'un insolent ou d'un tartufe.

Au lieu de sonder sérieusement ce qui est écrit ci-dessus, on se débarrasse souvent et vite de la réflexion à laquelle j'incite sous le prétexte bêlant "mais alors qu'essi' faudrait faire ?" C'est pourtant bien simple de voir ce qu'il faut faire : qu'on aide Eva Joly à payer ses frais de campagne, car il est bon de l'entendre ; et puis
– ou bien on rêve une candidature commune Joly-Mélenchon-(Montebourg ?) et on verra ensuite le partage des pouvoirs, si pouvoirs il y a
ou bien il faut s'abstenir en masse, et qu'au moins l'infâme élu ne puisse plus se prétendre "président de tous les Français" sans faire rire.
Tu t'étonnes que j'aie tout à coup ajouté Montebourg. C'est pour achever ma démonstration : car il y a aussi division entre ceux qui, comme lui, s'imaginent parvenir à quelque chose depuis l'intérieur de la gangrène où s'insère le PS, et ceux qui, comme toi, savent bien qu'on ne peut agir que de l'extérieur. Quel extérieur, alors ?
L'extérieur de l'isoloir. Les choses que tu as toujours faites et qui méritent le plus d'être qualifiées de faire. Manifester, faire des réunions, rencontrer partout. S'insérer parfois même dans un syndicat déviant, pour rencontrer encore et jauger et juger, pouvoir se faire entendre. Aligner les comités de tout ce que tu voudras si c'est opposé au consumérisme et au paraître ; redire toujours les réalités sociales, techniques, économiques, politiques...

Mais plus souvent. De plus haut.
Pour ce peu de plus, petit mais déterminant, t'informer. Pas seulement de la Libye : de l'histoire. Des bouleversements politiques, des énormes perversions techniques et, en arrière, des éblouissements scientifiques, qui ont fait ce siècle. Faire le tri du meilleur et du pire dans Marx et bien d'autres. Laisser tomber les nouveaux et plus nouveaux philosophes, choyés par France-Culture parce qu'ils sont le contraire de l'effort que je te demande, parce qu'ils sont des gens de parole et non d'action, parce qu'ils prêchent "l'insurrection pacifique" ou n'importe quoi, au lieu de tenter de t'instruire de ton temps, au lieu de te convaincre le plus tôt possible que nous n'échapperons pas aux exigences pérennes du progrès : remises à jour de la connaissance, donc de l'histoire, donc de la violence.

Par la force des choses, ce sera un jour la rue, et durement. Sinon, tu auras préparé, toi qui pourtant sais si bien que l'avenir passe par les enfants, la perpétuation de ce monde ignoble où des petits d'hommes n'ont pas accès à l'eau potable et où nos descendants par l'esprit et le cœur maudiront nos faiblesses.

samedi 21 janvier 2012

Actuel 1 : Un mot sur les sites proposés



Il y a eu le printemps passé quelque flamme à ATTAC : scènes de dispute, relative au président du Réseau Voltaire, Thierry Meyssan. Les acteurs ne se sont pas tous donné beaucoup de mal pour distinguer le président et le réseau : mais en tout cas, l’un des condamnants avait déclaré que si on publiait des textes de Meyssan, il n’y avait plus qu’à publier aussi des textes de Madame Le Pen...
Nul ne sort indemne d’un siècle de totalitarismes, et la liberté est la première victime de l’esprit de secte. Raison de plus pour contrôler de bien mauvais réflexes. 
On peut discuter d’abord le côté dame Le Pen de la condamnation. Soit un texte signé d’elle, et en fait surtout représentatif d'une démagogie qu'il faut se garder de trop personnaliser ; cela peut se rapprocher plus ou moins de trois types :
– le premier allie la dénonciation déclamée du système et le silence poli sur les apports au FN dudit même système, de par les générosités de la « droite nationale », c’est-à-dire des crapules héritières des patrons collabos pendant l’Occupation : c’est du rebattu, il n’y a pas à publier
– un deuxième est percutant, et peut éclairer diverses affaires où l’on retrouve côte à côte, pour dire vite, Sarkozy, Lagarde, Merkel, Hollande, CE & Co ; si c’est assez neuf, il faut publier, mais bien sûr rien n’interdit de faire des commentaires
– le dernier signale quelque abus des gens actuellement en place ; il faut d’abord vérifier, mais ensuite il semble souhaitable de publier en général, et sans commentaires.
En tout et surtout : on ne s'érige pas en censeur de ce à quoi le peuple peut être confronté, et on n'abdique en rien le rôle de critique.
Passons maintenant au télescopage entre les noms de Le Pen et Meyssan. Tous ceux qui ne se sont pas contentés d’avis de tiers le trouveront ridicule. Mais il y a davantage. On vient en somme de rappeler qu'il est non seulement du droit mais du devoir de tout lecteur, surtout professionnel, d'aller sur les erres de chacun et de n'importe qui : c'est ce que rappelait Lénine, peu suspect d’excès de bienveillance pour des adversaires. Or le Réseau Voltaire (et on voit mal que ce soit contre l’avis de son président) fait chaque jour la démonstration de cette élémentaire et nécessaire largeur de vues, et c'est simplement occasion de répéter qu'on ne combat pas les ennemis sans les connaître — voire en refusant de les voir, de les étudier, de les faire voir. Ensuite on doit trier, et faire trier.
Ce n'est pas assez dire encore, et le principal est plus loin. On ne cesse ici, et on ne cessera, de redire : la lutte politique est d'abord politique ; elle suppose donc en priorité la compréhension toujours approfondie et la dénonciation toujours étendue des pulsions puis abus de pur pouvoir, et c'est une fausse concrétisation, et une fausse compétence, de passer par les traductions économiques, spécialement monétaires. Le Réseau Voltaire respecte cette priorité, comme Michel Collon de référence plutôt marxiste, comme Rebelion devenue Rebellion antifasciste d'obédience anarchiste, comme Survie de tendance assez largement chrétienne. C'est même le cas pour ATTAC...-Gabon : mais ATTAC tout court fait en général le contraire