bienvenue, welcome, welkome,etc

Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


vendredi 24 février 2012

Actuel 6 : 2 exemples ( deuxième partie )

Abord des rapports entre économie et politique :
deux exemples en 2011-2012
(deuxième partie)
La première partie de cette recension s'efforçait de situer, dans la philosophie générale du blog, la brochure sur "Le casse du siècle" des éditions du Monde Diplomatique. On va cette fois parler du travail — du « labeur » disent les auteurs, et ils ont raison — accompli par Michel et Monique Pinçon sur "Le président des riches", aux éditions sœurs, La découverte.
Pour dégager l'axe de vue adopté ici, un exemple tiré du début de l'étude proprement dite, chapitre 2.
Les auteurs font une analyse serrée de législation, qui démontre sans conteste la brutalité avec laquelle la "majorité" UMP — majorité issue des urnes sous matraquage médiatique — vole les pauvres et facilite aux riches des diminutions perpétuelles d'impôts. Ainsi, côté pauvres, on fait basculer dans les revenus les indemnités versées aux accidentés du travail, et on leur arrache 230 millions €. Côté riches, on ne cesse de faciliter l'évasion fiscale, mais pour répondre (sur les media) au tollé venu de la mesure qu'on vient de voir, on fait passer les prélèvements sur la tranche supérieure de l'impôt de 40 à... 41% — contre 45% en Allemagne, 50% en Grande-Bretagne — : c'est bien calculé, ça donne aussi 230 millions €, et "donc" (pour les media) on prélève autant sur les riches que sur les pauvres ! Sauf que d'un côté, c'est la quantité de pain quotidien qui est diminuée,  alors que de l'autre on va devoir réduire un tout petit peu les aménagements de châteaux et résidences secondaires, tertiaires, quaternaires etc. De même, côté anti-pauvres, on multiplie vicieusement les impôts à la source et les taxes sur achats vitaux de tous les jours, tandis que, côté pro-riches, on opère des astuces et combines enchevêtrant les impôts IPP, ISF et les autres pour alléger encore et toujours le retour de richesse, à travers l'Etat, aux citoyens véritables : ceux qui contribuent à la création  de toute richesse, et non au parasitisme et aux nuisances de pouvoir...
On parvient ainsi à augmenter toujours la misère, et à aboutir en faveur des patrimoines et revenus déjà obèses et obscènes à des chèques énormes de "restitutions" et autres "trop-perçus" (30 millions de cette sorte d'allègements pour Madame Bettencourt, cf. p. 27 du livre pour ceux qui n'y croiraient pas) — sans parler des énormes évasions ou fraudes fiscales... 
L’analyse de nos auteurs est souvent ainsi remarquable de soin et de précision. Mieux, ils parviennent (p. 28) à la vraie question : et si les susdits obèses et obscènes n'étaient, tout simplement « de manière incurable, à la poursuite du toujours plus » ?
Or c'est cette poursuite pathologique du "toujours plus" qui éclaire tout, sans qu'il y ait nécessité de passer par des détails comme les surdépassements perpétuels de tricherie législative. En combien d'occurrences encore faudra-t-il souligner, à propos de faits et d'excellentes études qui les mettent au jour, que ce sont simplement des expressions politiques d'agressivité en fixation primitive, et de là perverse et contraire à l'épanouissement social ? Le livre des Pinçon n'est pas un hasard dans les circonstances de la "mondialisation", il n'est pas non plus choisi ici pour redire qu'au fond de tout il y a la volonté folle de pouvoir. Au contraire, il est simplement une occasion de plus de saisir la clef de compréhension globale : tout ce qui se publie de valable et de remarquable tourne autour de cette folie, et pourtant bien peu, en vérité bien peu d'auteurs et de lecteurs osent l'analyse de celle-ci dans les termes qui permettraient de l'attaquer le plus radicalement.
Toute la critique de l'ouvrage en question peut être ramenée à ce refrain. Bien sûr, c'est déjà beaucoup de se référer au plus remarquable de Marx, et de faire saisir à travers mille exemples le déséquilibre de fond : l'incitation sociale est déviée de la contribution au bien-être général, en faveur de l'accaparement individuel et fondamentalement oppressif. Mais il manque cruellement le complément concernant d'un côté la maladie des oppresseurs (et des opprimés), de l'autre tout ce qui est perdu par là de développement général et progrès, de culture humaine.

Une fois cela dit, il reste à faire au moins partiellement la liste —impressionnante — de tous les éléments rendus accessibles par ce bon ouvrage. En vrac, alternant crimes sous-terrains et paillettes de devantures, on peut citer : niches fiscales anti-impôts ; décorations et honneurs pour les accapareurs ; aboutissements en médicaments mortels de laboratoires réduits à la recherche du profit ; utilisation des mises en scène en hippodromes ou en cafés de Flore pour enfler les outres qui finissent par se croire quelqu'un ; lotissements insolents étalés, érigés en domaines réservés, étouffant le voisinage ("pas de HLM près de chez nous") ; magistrats incités à consacrer leur temps à des dîners affairistes, et au contraire brimés s'ils s'occupent plutôt de faire simplement respecter les lois (pourtant peu imbibées de socialisme) ; multiplicité, pour quelques ogres, des sièges en conseils d'administration des transnationales et en cabinets ministériels ; passage en force des lois favorables aux oligarques, contre tout débat même seulement intérieur à l'UMP ; dureté croissante et application de plus en plus dure des punitions contre les pauvres, dépénalisation de la délinquance financière et laxisme dans l'application de ce qui reste de légalité contre elle ; banques renflouées de leur gestion inhumaine par l'argent du peuple, puis prêtant à l'Etat ce même argent à des taux qui font exploser la "dette publique" ; agences "de notation" se réservant le jugement... des banques qui en sont actionnaires ; prévisions plus qu'optimistes des experts quelques instants avant la "crise" — le krach financier le plus terrible depuis 1929 —. Ce n'est qu'un aperçu des éléments du livre, chaque fois traités documents à l'appui et rattachés au sujet principal. Beau boulot !

Qu'on se propose toutefois de voir ce que dit de plus l'analyse du psychisme des dominants. Un seul exemple, toujours tiré de ce remarquable travail, mène loin : c'est le tableau que font ses auteurs de la parole à la Sarkozy. Car celui-ci fait des discours accablant mai 68 du cynisme capitaliste (le XIXe entre autres n'a donc pas existé !) ; il s'indigne vertueusement des parvenus en tout genre issus de cette immoralité, lui l'irréprochable entre tous les Pasqua-parrains ; il assure que « les paradis fiscaux, c'est ter-mi-né » alors qu'ils sont simplement déclarés... ne plus être des paradis fiscaux ; il promet des primes pour les plus misérables et s'arrête à l'effet de cette annonce, qu'on constate ensuite honteusement mensongère ; il parle en termes de "réforme", comme si c'était progrès, d'une mise en œuvre réactionnaire toujours plus violente...
Les auteurs soulignent eux-mêmes que leur mise en cause ne concerne évidemment pas un homme seul : il y a tout un ensemble de dévoyés abusant du vent de l'histoire. De leurs exemples, on peut choisir celui-ci : il y a eu un vrai début de révolte d'ouvriers chez Continental, à Clairoix dans l'Oise, après qu'en leur annonçant leur licenciement en France, on ait osé leur proposer comme reconversion un Eldorado de 137 € par mois en Tunisie. Et voilà à partir de quelles "offres", comme si ce n'était pas déjà plus qu'indécent, on injurie encore les travailleurs en les accusant d'archaïsme s'ils cherchent à maintenir quelque défense, quelque sécurité sociale !

Hypocrisie alors ? Non. Pas seulement. Ce qui fait le moteur et l'efficacité de telles brutalités est plus profond, et revoilà la pathologie : c'est le propre du psychotique de projeter sa maladie sur les autres, de déclarer les autres anormaux et de se poser en exemple de développement et épanouissement naturels, tout en jouissant plus ou moins obscurément de faire de la provocation
Ce n'est ni exceptionnel ni simplement imprudent : c'est de la pure compulsion. Les dominants, pathologiquement, et surtout les récents parvenus, ne peuvent se priver de ce télescopage incohérent : tartuferie en profondeur, dissimulation en même temps qu'insolence. C'est un coup bas sur le plan moral et logique, mais c'est efficace : devant la parade du "vous voudriez bien être à ma place", les victimes populaires ne peuvent s'empêcher de reconnaître en elles-mêmes les origines lointaines de ces compulsions, mais elles ne peuvent en analyser — surtout à court terme — la perversion chez ceux qui ont "réussi" ; alors elles cèdent tantôt à la rage, peu éclairante, tantôt au découragement : bonne affaire pour le pouvoir. Il faut donc adjoindre à l'analyse de la maladie du côté des sadiques son miroir chez les opprimés.

On fera dans d'autres pages ce genre d'analyse. En attendant, tout ce qu'on a déjà tiré ici du livre des Pinçon le fait vigoureusement recommander — comme "Le casse du siècle" étudié en premier exemple de ce titre-ci, et comme la superbe synthèse de François Ruffin parue voici quatre ans dans le Diplo ("Le partage des richesses", sur la Toile http://www.monde-diplomatique.fr/2008/01/RUFFIN/15507) —.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire