Trop c'est trop et, après les nouvelles horreurs à Bruxelles, la méfiance
semble enfin se généraliser un peu contre les racontars de "décryptage",
en fait encryptage médiatique. La
Toile a donné de bons articles sur l'affaire : mais celui qu'on présente
ici vise une indispensable explication absente
ailleurs, celle du comportement
— des brutes tyranniques certes, mais aussi des foules.
En
2002, en Belgique justement, les éditions EPO faisaient paraître le travail de
Peter Franssen avec Paul De Vos sur le 11
septembre [2001] : pourquoi ils ont laissé faire les pirates de l'air.
En quatrième de couverture, on trouve une conclusion vite étendue aux cas
actuels : les services de renseignements suivaient de près les criminels et les
ont laissé faire sciemment.
Depuis ces années certes, il y a eu des
raffinements, et il est désormais encore plus difficile d'éveiller les gens
ordinaires à éviter la passion et à suivre les nœuds de manœuvres des divers
Etats par leurs S. S. = Services Secrets. Cependant même
des gens de vrai journalisme acceptent de jouer aux Sherlock Holmes de ces
crimes, et cherchent sans grands moyens des qui
et des comment. Il ne faut pas se
laisser ainsi entraîner aux "demandes" qui "attirent" comme
d'autres flaques de faits divers. Le plus important est aujourd'hui simple et éclatant :
il faut suivre les leçons qu'ont tirées les pouvoirs de telles manipulations et
de leurs "succès". Ce que nous venons de revoir à propos de Bruxelles,
c'est que non seulement la recherche de la vérité demeure misérablement
minoritaire, mais que les provocations des pouvoirs S'ÉTENDENT EN MÊME TEMPS que
l'égarement des foules. Dans une ambiance de folie croissante se multiplient
les lois scélérates détruisant les droits à l'information, à
l'expression, au déplacement ou au travail, en même temps que se répondent
les fanatismes et les racismes. La réflexion a donc d'autres rôles à assumer que
de se lancer dans des enquêtes sans instruments convenables — ou d'assurer en
toute démagogie que la prise de conscience naturelle des masses va à elle seule
sauver l'humanité de l'horreur où la précipitent les psychotiques gouvernants.
Les
expériences d'autres Guerres Mondiales fournissent là-dessus d'importantes données.
A partir de 1914 en particulier, les privilégiés pervers qui poussaient à la
barbarie ont pris les leviers de commande et fait sombrer dans le désastre, bien plus
souvent que les êtres de raison et savoir n'ont pu éviter le pire.
Est-il alors indispensable que de nouvelles tornades de massacres se
produisent, non plus par millions mais par milliards de victimes, pour que
suffisamment de cerveaux songent à ce que représentent l'animalité dans l'humain,
l'aveuglement
inévitable chez les malheureux et le sadisme chez les dirigeants ?
Or là
passe l'essentiel. Les hasards cruels de l'histoire prolongent
ceux de l'évolution, et l'éducation réelle se fait de telle
façon que chez les êtres ordinaires, même les plus enclins à tenir compte de
l'expérience morale et politique perçoivent trop lentement (et à l'encontre des
dressages officiels) les perversions auxquelles mènent la volonté de pouvoir et
le goût de la domination à n'importe quel prix. Pour le malheur de tous, la réaction
la plus commune est alors de s'écarter de "la"
politique : au lieu de saisir le danger qu'il y a à laisser des fous de
privilèges aux postes de commande, la plupart des citoyens se contentent de se
conduire assez proprement à leur échelle, de jouir raisonnablement de la vie
tant qu'elle n'est pas rendue insupportable, et de tenter de s'abriter au mieux
quand l'insupportable est là. C'est cela seul qui rend compte des principales
misères, parfois incroyables d'intensité, dans l'aventure de notre espèce.
Jamais il n'a été aussi simple de le voir. Jamais les enjeux n'ont aussi
clairement inclus la survie même de notre humanité. Jamais l'entêtement paresseux
contre la connaissance, notamment la science du comportement (l'éthologie),
n'a été aussi complet.
C'est pour cela qu'on s'est résolu
ici à prendre date et situer les récents crimes à Bruxelles dans la perspective
éthologique
si souvent répétée dans ce blog. On a évité le mot dans les paragraphes
ci-dessus : mais la perspective des guerres de plus en plus effroyables,
par leurs techniques comme par leur ampleur, est bien celle tant de fois déjà répétée
— pour reprendre encore l'image, extraordinaire de justesse, de Lorenz dans son
texte le plus important : si un astronome d'une autre planète voyait défiler
un film en accéléré des derniers millénaires, il n'hésiterait pas à croire à la
vie sur la Terre, mais il conclurait sans hésiter à la totale déraison
dans son histoire.
Il
n'est certes pas question d'abdiquer : il faut donc entre autres participer
aux quelques soubresauts très encadrés qui par exemple agitent en ce moment la
France contre la loi de destruction du droit du travail, par un pouvoir sauvage
en ce moment capitalisme sauvage. Mais : entre autres. Camus
disait : « si on renonce à une part de ce qui est, il faut renoncer
soi-même à être ». Il ne faut pas renoncer à la vérité la plus forte
sur les attentats parce que le pouvoir y remue des chiffons rouges ou
verts, cherchant en même temps, derrière eux, à dissimuler et faire passer les
moyens de flicage des citoyens dans leur appauvrissement accru.
Cet effort de vérité en
profondeur paraît d'abord d'autant plus déphasé que se déchaînent des
poussées totalitaires (racismes, "populismes") dont un long siècle à
présent multiplie les exemples, tant du côté de l'égarement des foules que de
la folie manipulatoire des potentats. Mais on tient là au contraire des preuves
supplémentaires de ce qu'a produit l'ignorance de TOUS, les bardés de
marxismes comme les autres, du fond comportemental des dominants comme
des dominés. Surtout au moment où les gens sont matraqués de mensonges pour
leur faire gober des empilements amalgamant idioties patentes, appels à réflexes
conditionnés et fatras variés, il faut faire voir, étudier, analyser, dépassionner
et enfin raisonner : la base éthologique est ouverte à tous pour cela. En
blogs, textes, discussions, débats, même dans le bruit ridicule des sonos — spécialité
trop souvent syndicale — qui privent les gens de communiquer dans la réflexion
jusque dans les manifs, il faut tâcher qu'au moins quelques-uns perçoivent « les
ondes longues de l'histoire », et la splendeur explicative et immédiatement
active de l'éthologie tend le tremplin de science dont on a trop longtemps et
cruellement manqué.
Si le plus vital à faire était
facile, il y a beau temps que l'humanité respirerait librement. Alors qu'on répète
et se répète : ce n'est pas facile, c'est seulement indispensable.
C'est
plus vital que jamais.
Encore pour faire vite, la référence
commode ici est le
Condensé
d'éthologie politique
en trois "actuels", 84-5-6,
mis en ligne sur ce blog en mai 2015 :
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