Dans le récent crime
d'Aulnay-sous-bois, Théo a été héroïque. Car, contre les exactions des pouvoirs,
le simple témoignage de ce qu'on a subi devient admirable : il redémontre
en actualité les procédés de maintien des privilèges, que les privilégiés ne
peuvent toujours cacher. C'est dans cet éclairage
qu'il faut donner son sens à l'affaire, parce qu'ainsi on peut comprendre
et combattre la peur, parfois l'abjection, de foules rangées à l'ombre de bêtes
féroces victorieuses, foules qui souvent se plient et acceptent l'infamie des
fauves.
C'est pour donner toute sa force à
cet éclairage qu'il faut le projeter en perspective, et c'est ce qu'on veut ici.
Quant aux faits mêmes de
violences policières il n'y a plus, pour tenter d'entretenir le doute, que
l'IGPN et la droite, puante et revendiquée. Sur ce thème, on peut penser
d'abord à de récentes séances au Palais-Bourbon et à ses parlementaires de
carrière, très majoritairement fidèles et constants courtiers vendus aux partis
subventionnés par la finance (ça écorche les oreilles d'entendre appeler ça Représentation,
Assemblée, Nationale !). Or on a pu suivre à la radio la retransmission
des hurlements échangés entre Bernard Cazeneuve et aboyeurs déchaînés en défenseurs
des pauvres "forces de l'ordre" vierges et martyres — ministre et députés
unanimes devant les "réussites" de flics programmés en tortionnaires
sadiques.
Ce n'est hélas, dans la montée des
fureurs populaires, que l'un des derniers exemples de la convergence entre mobilisation
policière de l'armée et répression flicarde, et l'on voit donc celle-ci systématiser
les procédés depuis longtemps chers aux dictatures du Tiers-Monde : les zones
sensibles, dont les muqueuses sexuelles, sont cibles très utilisées de chocs mécaniques
ou électriques. Voilà ce qu'il faut comprendre
dans toute sa portée — pas seulement pour Théo.
Ce sont les procédés inévitables de la terreur : même des
citoyens véritables, qui seraient prêts à risquer leur vie pour un idéal démocratique,
reculent devant de tels raffinements de
barbarie. En face d'eux, sachant cela, les Etats se déchaînent en terroristes, réels et bien organisés.
Bien entendu, ils se posent en même temps en "sécuritaires"
protecteurs de leurs citoyens : c'est ainsi qu'au plus haut niveau de la République
et de ses pouvoirs, patronaux notamment, d'un
côté on trafique avec des monstres en matière de droits de l'homme, du genre de
l'Arabie Saoudite (financier en chef de "l'Etat" islamique), et de l'autre c'est la CGT qu'on accuse, par
l'extrême Pierre Gattaz, de terrorisme... Là encore, la conscience des
citoyens n'est pas assez éveillée et entretenue. Quand on songe
– au traitement réservé à la démocratie
dans l'entreprise capitaliste
– aux licenciements secs pour
"discipline générale"
– à la terreur perpétuelle du burn out, des benchmarking et évaluations à
360°
– à l'abus incessant des législations
"européennes", du racisme et des "sans-papiers", pour baisser
à toute force les salaires
bref à tous les crimes quotidiens
couverts par la "liberté du marché",
cette
affaire Gattaz a de quoi faire voir loin et fort : en particulier, Monsieur
Gattaz, accusé sur plainte syndicale de dire ce qu'il a dit, a été relaxé par
l'institution judiciaire. Après quoi celle-ci veut qu'on l'appelle Justice...
Mots renversés à contre-sens,
vocabulaire de la violence : puis on accuse de comploto-conspirationnisme des
sites de la Toile et en général les gens qui prétendent à des restes de liberté
de la presse — "liberté exécrable",
source d'horreur démocratique qui faisait déjà "couler les larmes" de S. S. le pape : mais si, mais
si, relisez de Grégoire XVI, assassin en chef des républicains d'Italie par soldats
Autrichiens et Français interposés, l'Encyclique Mirari vos, concoctée en 1832...
Qui sait simplement, parmi ceux qui
veulent (ou s'arrangent pour) retenir du catholicisme tout autre chose que les
crimes papaux, un peu d'histoire réelle
des rapports entre Eglise, République et Déclarations des Droits ? Plus
largement qui, parmi les religieux, sait l'histoire
et non l'hagiographie de sa religion ? Qui est capable de faire la différence
entre la réalité d'expérience
universelle et les racontars brandis totalitairement
en textes sacrés, en abusant des
enfants et de leur ignorance pour inculquer des faussetés comme vérité, et en préparant
ainsi les guerres de religion ? Qui
sait par quelles terreurs, toujours bien semblables et toujours bien cachées
des manuels officiels, on a "converti" aux diverses "fois",
comme on a forgé les autres prétextes de massacres, divisions, frontières et nations ?
De ces responsabilités premières il
est facile de descendre aux autres. Comme le répète ce blog chaque fois qu'on a
l'occasion de remonter à l'essentielle éthologie politique (et c'est souvent) :
si l'agressivité peut donner les
structures de pouvoir, c'est parce qu'il y a de l'animalité dans l'humain, et
que cette animalité peut rester brute, inculte, étanche à la raison et au savoir qui eux caractérisent notre espèce.
Théo est humain, et très humain : le
flic qui l'a torturé est demeuré semblable aux tortionnaires et Inquisiteurs
des Frères prêcheurs, KGB, S. S., PIDE, DINA, SAVAK, colonels des guerres
coloniales et adeptes de Kitson comme de CIA ou MI5 & 6, etc.
Il n'y a certes pas à cultiver
l'affection pour de tels bourreaux, évidents et directs (ce qu'ont pourtant fait
les députés français cités plus haut). Mais
qui ose, bien au delà, lever le regard
vers les pouvoirs mêmes, formateurs et organisateurs de ces bourreaux ?
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