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Ce blog comporte quatre parties :

– les articles simplement actuels

– des textes de fond, insistant sur le point de vue expressément politique adopté partout ici

– des rédactions plus anciennes par exemple à propos de simples citoyens d’un côté, de potentats de l’autre, aux Etats-Unis

– des échanges avec correspondants qui seraient trop restreints à l'intérieur des cases prévues.


jeudi 14 mars 2013

Actuel 37 Un DVD, un livre qui changent des mass merdia


Le DVD du film "Les nouveaux chiens de garde" est donc sorti. Il offre les moyens de diffuser, d'un citoyen à l'autre, des images remarquables à propos des liens entre argent et journaleux. Il est accessible, si l'on veut à partir d'Internet, autour de 15€. Chacun peut en faire sa critique, à une condition que ce blog recommande vivement de satisfaire : d'abord le voir.
 Les préoccupations étroitement économiques sont déjà dépassées, à juste titre, dans cette vidéo. C'est très bien : ce sont des raisons de plus d'espérer que, d'ici quelques siècles, peut-être quelques décennies voire moins, même les honnêtes gens finiront par se préoccuper de la manipulation des foules et de ses bases éthologiques. Ainsi la révolution se rapproche, mais pas très vite...
La folle révolte ne la devancera-t-elle pas, à force de retard des organisations progressistes en synthèse d'expérience, science comme histoire, à force de retard de la théorie sur la réalité et les rages que celle-ci engendre ?
Tant que ce blog existera, il désignera ce malheur.

Sur un sujet apparemment autre, à peu près tout le monde — droite et gauche bourgeoises, économistes et historiens, progressistes et réactionnaires — reconnaît un tournant important dans les années 1970. Qu'on le situe par des mots comme "fin des trente glorieuses" ou "début de crises et chômage de masse", le changement est net. Il est naturel d'en chercher l'explication. Il n'est pas juste d'en chercher une cause unique. Mais c'est une part de l'exigence de cohérence que de définir, autant que faire se peut, une hiérarchie des importances de causes. C'est de cela que parle, avec plein de choses intéressantes et profondes, le livre de François Ruffin ("Leur grande trouille", éd. "Les liens qui libèrent", 2011).
On écartera ici dès l'abord, comme l'auteur, les devantures comme "abandon de l'étalon-or" ou "choc pétrolier" : ces effets marginaux peuvent être prétextes à étalage de connaissances raffinées et sans intérêt, mais pas à une analyse de déterminations. Ce serait déjà plus raisonnable de se souvenir des rencontres mafieuses précoces, et comme prémonitoires, autour de Lucky Luciano. En tout cas l'évidence est politique : la lutte pour le pouvoir, aux échelles nationales et mondiale, a vu s'établir un basculement qu'il faut beaucoup de malhonnêteté pour ramener simplement à des classes. La grande affaire est donc que les modes de domination ont changé, et changé aux mêmes échelles : à l'intérieur des frontières et sur la planète. Mais par quels intermédiaires ?
Pas simplement militaires. La supériorité des armes ne peut à elle seule expliquer la victoire de l'impérialisme anglo-saxon : ainsi, l'URSS ne pouvait plus supporter la course aux missiles et aux bombes parce que son économie en faisait un colosse aux pieds d'argile.
On peut glisser de là sur une pente dangereuse : l'économisme. Tout n'y est pas faux. Par exemple, il est vrai que du côté de l'argent, la liberté de pillage et accaparement dissimulés par la "dérégulation" (l'absence de tout contrôle démocratique et notamment judiciaire sur les vols mafieux, dont la fuite en paradis fiscaux), avec son corollaire en abaissement vertigineux des droits de douane, joue un rôle considérable dans la mise en œuvre de l'écrasement des peuples et spécialement des travailleurs : la menace du chômage a pu être exercée avec la dernière violence, par mise en concurrence
– des travailleurs qui acceptent n'importe quel niveau de paye sous le terrorisme — impérialiste ou "communiste" chinois —
– et des ouvriers survivant dans les pays riches, jusque-là préservés par les nécessités de façades démocratiques.
Seulement à partir de là et dans l'actualité, si on pense trop aux salaires en Asie, au rythme des "délocalisations", aux coûts du travail ratatinés par la production en famine du monde pauvre, on risque de ne plus voir que cela. On risque d'en faire l'explication universelle de ce qui s'est passé depuis les années 1970.
Ce serait très grave. Ce serait manquer l'essentiel historique. On doit essayer de lire plus loin.

Dans les années 1960, les audaces étudiantes, ouvrières, tiers-mondistes permises par un relatif mieux-être terrorisaient les pouvoirs, notamment à l'Ouest. Un fort intelligent Prix Nobel d'économie (ça existe) multipliait les exposés sur la possibilité d'une automatisation rapide et presque complète, en utilisant en investissements très orientés une part relativement faible des profits. Wassili Leontieff pouvait mener sa démonstration notamment grâce aux technologies de pointe où les plus-values battaient déjà d'incroyables records (ainsi : 1000% pour des photocopieuses). Technique et surprofit : un des domaines où tous les marxismes, relativement fidèles ou déjà totalement corrompus, ne cessaient d'accuser un retard pathologique. Qu'on réfléchisse à partir de là : à quel système pouvait le plus profiter, dans la lutte pour le pouvoir, ces avancées extraordinaires ? celui où il y avait propriété privée des moyens de production (et donc accaparements des retours d'investissement), ou celui paralysé par le droit de tous au travail ?
Dans le système capitaliste, productivité et profit énormes signifient possibilité de produire en masse sans travailleurs ou presque, donc efficacité multipliée de la menace du chômage. Dans le système se réclamant du socialisme, production plus facile signifie richesse potentielle pour tous et menace pour la domination de la bureaucratie (car celle-ci régissait d'abord à partir du niveau des usines) : il valait bien mieux parader dans l'espace en Gagarine & Co.
Concluez, s'il vous plaît. Ne vous contentez pas de relire l'histoire.

En bref : les capitalistes n'ont pas tout compris tout de suite, mais ils étaient quotidiennement confrontés à l'expérience par leur pouvoir, et des conseillers hors pair (tels ceux des présidents des Etats-Unis, très spécialement von Neumann et Wigner — en France André Lichnérowicz) les incitaient énergiquement à mesurer ce que leur offrait le monde du "microscopique" : à côté des bombes et missiles, l'automatisation dans l'industrie CIVILE — on parle moins aujourd'hui de Norbert Wiener, beaucoup moins féroce, et de ses propositions "cybernétiques" —.
Si l'on pense à ce que cela représente, on ne peut plus voir la baisse des tarifs douaniers que comme simplement UN des engrenages. Le moteur (même en économie), c'est la volonté de pouvoir passée par l'automatisation à outrance, menace et réalité de chômage : d'un côté, on voit que l'abaissement des taxes aux frontières n'a guère accéléré ni diminué de 1945 à 2000 ou 2010 ; de l'autre côté au contraire, c'est sans conteste à partir des années 1970 que les robots ont ENVAHI les usines et les bureaux (et les téléphones personnels, s'il faut préciser : appelez donc votre gare au départ d'une grande ville, votre revendeur ou votre administration, et vous revivrez plaisamment ce que serveur vocal veut dire).
Voilà le cœur de la question, voilà l'essentiel, voilà la grande affaire.
Ne comptez pas trop sur les "chiens de garde" pour vous en informer clairement. Mais quelle tristesse, que leurs dénonciateurs mêmes n'en disent pas davantage !

Ceci posé, bien des données reprises par Ruffin ou dans le DVD gardent tout leur intérêt. On va ici les éclairer du point de vue de Gray et consorts, c'est-à-dire des ancêtres de Marx et Proudhon : la grande nécessité est de ne jamais perdre de vue
1) la carte de travail pour tous — donc l'interdiction de toute fortune personnelle excédant la durée de travail d'une vie
2) le problème politique central, l'expression directe de la volonté générale, au-dessus de toute banque d'Etat.
Même en se restreignant à ce qui concerne la production (tant pis ici pour l'éthologie), on propose donc d'équilibrer déjà l'économique par le politique et on reconnaît les perversions inévitables de toute appréciation en monnaie.
Sur ces bases alors, juste quelques touches significatives : dans nos années 2010, l'ordre de grandeur des dividendes versés aux actionnaires des entreprises du CAC 40 (ce ne sont pas tous les profits) est de quarante milliards €. Il y a (à la louche et pour arrondir) quatre millions de (foyers) de chômeurs ou (gravement) pauvres en France. La redistribution des sommes perçues en dividendes leur permettrait donc de recevoir une allocation de DIX MILLE €, soit neuf fois le SMIC net, PAR FOYER ET PAR AN.
Idem : les données sur Internet placent les dividendes versés en Allemagne aux environs de 25 à 30 milliards €, soit le tiers en moins. On doit remarquer alors que la population outre-Rhin est de quelque 80 millions d'êtres, contre quelque 60 millions ici. Cette comparaison doit être accompagnée d'une note pour mémoire : Marx et Engels rappelaient que la France est le pays de la férocité inégalitaire. Cela résulte-t-il de chromosomes français ?! ou arrive-t-il que des réalités historiques sur des siècles ne s'expliquent pas par la seule écono-manie ?

Bien d'autres choses valent, sur les mêmes bases, le détour par le DVD et le livre en cause. On en retiendra ici deux seulement :
1) La durée moyenne de vie chez "les riches" (les "20% les plus riches") est dans l'hexagone de l'ordre de 80 ans, contre 65-70 chez "les pauvres" (aussi : les "20% les plus pauvres" ; en fait, la différence devient nettement plus grande si on raffine). Ecart résultant : 10 à 15 ans. Au Royaume-Uni, on en est à plus de vingt — près de trente, 30 ! d'après l'étude citée dans le DVD, dans la ville de Glasgow — : "a beacon to the world" (un phare pour le monde), comme a dit pour le rôle des thatchériens Monsieur Anthony Blair (SVP lisez "Les dépossédés", de Robert McLiam Wilson)...
2) Tous les ministres sarkozystes, et bien d'autres depuis, serinent sans se lasser qu'il faut attirer beaucoup de riches en France en réduisant leurs impôts, pour... qu'ils enrichissent l'Etat par les impôts ! Pour ridiculiser tout à fait cette absurdité, passons à la limite, et imaginons :
afin de faire venir tous les riches en France, on annule leurs impôts dans ce pays ; ils arrivent en foule ; soit N leur nombre, mais ils ne paient RIEN en contributions à l'Etat : en tout, celui-ci touche N fois ZÉRO.
Ça fait combien, à votre avis ?

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